L'ENGIN ET LA ZONE S'AFFICHENT LE 13 DÉCEMBRE

Le 11/12/2014 à 13:48 par La Rédaction

 

À partir de ce samedi 13 décembre, les produits de la pêche et de l’aquaculture arboreront de nouvelles étiquettes. C’est une mesure de la nouvelle PCP (politique commune de la pêche), via son règlement OCM (organisation commune des marchés) adopté le 11 décembre 2013. L’objectif, explique la Commission européenne : « Renforcer les exigences d’information des consommateurs, afin de les aider à faire des choix en connaissance de cause. »

Pour la pêche, deux grandes nouveautés. D’abord, l’affichage d’une origine plus précise. Finie la mention ANE (Atlantique nord-est) retrouvée largement. Place aux sous-zones : Mer du Nord (zone FAO 27 sous-zone IV), Ouest Écosse (VI), Manche et Mers Celtiques (VII), Golfe de Gascogne (VIII), Ouest Portugal (IX), Ouest Méditerranée (FAO 37.I), etc. Pour les poissons d’aquaculture, le pays d’élevage correspond au pays dans lequel le produit a atteint plus de la moitié de son poids final, ou est resté plus de la moitié de la période d’élevage (et pour les coquillages, les six derniers mois).
L’autre grande nouveauté, redoutée de certains : la mention de l’engin de pêche : senne, chalut, filet maillant, filet tournant ou soulevé, ligne, drague, casier, pêche à pied ou plongée. Quel en sera l’impact ? Le consommateur ne risque-t-il pas de tourner le dos au chalut ?

À indiquer aussi : comme depuis 2001 (règlement UE 1169/2011 dit Icda), le nom commercial et scientifique de l’espèce et le mode de production (capture ou élevage) ; et si le produit a été décongelé (avec quelques exceptions). Dans un mélange de lots, tous les engins et modes de production s’affichent, et au moins la zone du plus grand lot.

Ce règlement s’applique aux produits préemballés ou non, dans ce dernier cas l’information est donnée sur des étiquettes, panneaux, affiches, cartes ou autres, clairement associés aux produits concernés. Mais il concerne peu de produits transformés ; en revanche il s’impose aussi aux produits importés par l’UE. Certains doivent aussi arborer une date de durabilité minimale. Pas ceux non préemballés frais en France, mais c’est le cas des produits préemballés (sauf s’il y a déjà une DLC, date limite de consommation), non préemballés congelés (par exemple les filets congelés), et dans certains États membres les non préemballés frais. D’autres mentions ne sont que volontaires, comme la date de capture (qui a failli être obligatoire), ou plus de précisions sur l’origine géographique ou l’engin.
 
Des pêcheurs aux distributeurs :
la filière est-elle prête ?
 
La filière est-elle prête pour ce chamboulement ? A priori oui pour la grande distribution, de façon très variable pour les poissonneries, et globalement oui du côté des grossistes et mareyeurs.  « La majorité des mareyeurs ont fait les investissements pour, indique Gaël Michel, secrétaire général de l’Union du mareyage français. Il y a eu tout un travail avec la DGCCRF, les enseignes et France Filière Pêche, par exemple sur le choix de noms de zone pertinents. » Car il a fallu simplifier par rapport à ce que prévoyait la Commission : par exemple il aurait fallu en sous-zone VII indiquer tous les secteurs d’affilé (mer d’Irlande, Ouest Irlande, Porcupine Bank, etc), qui ont été résumés en « Manche et Mers Celtiques ». « Tout est à peu près validé pour l’aval, même si les règles définitives n’ont été validées que depuis quelques semaines. On sait comment codifier les informations aux clients. »

Mais mareyeurs et grossistes soulignent aussi le coût. « Les résultats de 2015 seront pénalisés par les coûts de la réforme de l’étiquetage », prévient Philippe Vignaud, dirigeant du groupe Vives-Eaux. Présent sur toutes les façades du littoral français, hors Méditerranée (13 000 tonnes commercialisées par an), il a carrément embauché une personne dédiée. « Le règlement va générer des coûts supplémentaires », renchérit le grossiste François Labulle. Et cette réforme « risque de pénaliser les petits bateaux aux lots hétérogènes ». « Je ne suis pas du tout sûr que le consommateur trouvera un vrai plus dans les nouvelles étiquettes », ajoute le transformateur Patrick Barinet, codirigeant de Greenland Seafood Europe (poisson pané).*

Confiant sur l’aval, Gaël Michel l’est moins pour l’amont de la filière. « Je crains une fourniture de données très hétérogène de la part des criées, qui ne pourront pas toutes fournir l’information en temps et en heure ».Yves Guirriec, président de l’association des responsables de halles à marée, se veut plus rassurant. « Globalement, on est tous dans les clous, sous des formes variées et diverses. 100 % des criées seront prêtes pour le 13 décembre. » Pour elles, ce règlement se superpose avec le règlement contrôle (traçabilité) pour lequel elles sont en train de développer des applications, en collaboration avec la DPMA (direction des pêches maritimes et de l’aquaculture). Le système devrait être opérationnel au printemps. En attendant, selon les criées, l’information requise sera donnée sur bon de livraison, facture, portail web, fichier excell, et soit avant, soit juste après la vente, soit le lendemain. « De façon transitoire, certains seront en mesure de donner l’information en temps réel, d’autres non, convient Yves Guirriec. Mais en général elle sera donnée avant la vente, sur les catalogues de vente. Encore faut-il la récupérer auprès des producteurs, ce n’est pas évident… »

C’est facile auprès des armements, mais « culturellement, ce sera long de collecter l’info auprès des petits producteurs », qui utilisent parfois plusieurs engins. En pratique, dans un premier temps, la connaissance fine des pratiques des pêcheurs par les criées est mise à contribution : zones fréquentées, engin utilisé pour telle espèce. Mais la participation active du premier échelon, la pêche, est nécessaire pour éviter les refus de lots en bout de chaîne…
 

Solène LE ROUX
 

* Retrouvez ces paroles de grossistes et mareyeurs dans les entretiens du « Panorama » édité par PdM d’ici la fin de l’année.
 
Liens utiles :

• Questions-réponses de la Commission européenne sur l’application de ce règlement
http://ec.europa.eu/fisheries/cfp/market/faq/index_fr.htm

Guide de poche de la Commission européenne sur l’application de ce règlement (en anglais)
http://ec.europa.eu/fisheries/documentation/publications/eu-new-fish-and-aquaculture-consumer-labels-pocket-guide_en.pdf

• Note de la DGCCRF sur ce nouvel étiquetage
http://www.economie.gouv.fr/dgccrf/linformation-des-consommateurs-sur-produits-peche-et-laquaculture

• Mise en œuvre du règlement contrôle sur la traçabilité : information du CNPMEM ; information de la DPMA
http://www.comite-peches.fr/tracabilite-mise-en-oeuvre-du-reglement-controle/
et
http://www.developpement-durable.gouv.fr/Cahier-des-charges,34228.html

• Article du marin du 16 juin 2014 : « Engin de pêche sur l’étiquette : l’impact risque d’être fort »
http://www.lemarin.fr/articles/detail/items/lengin-de-peche-sur-letiquette-limpact-risque-detre-fort.html
 

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