Il pourrait être doublement accablé en cette mi-novembre : d’abord, comme tous les Français, sous le choc des attentats parisiens. Et en tant que dirigeant de 5 degrés ouest, jeune entreprise finistérienne qui produit une gamme de chair de crustacés et de coquillages décortiqués par hautes pressions. La restauration, destination essentielle de ces produits haut de gamme, surgelés par cryogénie, est touchée de plein fouet : un client traiteur parisien enregistre déjà plus d’1,50 M€ d’annulation de réceptions…
Mais Alexis Taugé relativise l’impact économique du climat de guerre actuel. Son enthousiasme reprend le dessus lorsqu’il évoque la construction du nouveau site de production (2 000 m2) à Lorient, dès 2016. Hébergés depuis la création en 2010 dans les locaux de l’entreprise ostréicole Cadoret, sur les rives du Belon à Riec, Alexis et ses 20 employés (ETP) – dont 12 CDI – sont à l’étroit. Difficile de traiter aujourd’hui 250 t de homard, 100 t de coques et 250 t de moules, amandes, huîtres et divers bivalves.
Le pari technologique et commercial était risqué, lorsque le jeune assistant parlementaire qu’il était en 2010 largue avec bonheur une carrière politique. Il met au point en deux ans de travail acharné le process de décorticage à froid de produits de la mer frais. Son grand-père maternel, François Cadoret, cherchait à décortiquer ses grosses huîtres, et Alexis, diplômé de la Sorbonne, a compris très vite le potentiel qualitatif de la technologie des hautes pressions. Les collectivités territoriales et un soutien familial continu ont accompagné le lauréat de nombreux prix d'innovation.
La machine d’Hyperbaric est installée à Riec en mai 2011, alors qu’un bon réseau de restaurateurs français est déjà séduit par les échantillons de chair de homard bleu. L’envol commercial de la start-up est lié à cette espèce, qu’il est toujours seul au monde à produire de cette manière. Le marché et les banques sont conquis.
Depuis, le jeune entrepreneur de 31 ans n’a cessé d’innover, notamment dans l’automatisation de la production. L’enjeu en 2016 est de trouver de nouveaux marchés pour les coquillages, qui assurent une activité toute l’année, gage de rentabilité. 5 degrés ouest va développer aussi une autre gamme de produits, pasteurisés à froid. Qu’Alexis compte bien présenter au prochain Seafood de Bruxelles, en particulier des filets de poisson lorientais.
Texte et photo : Lionel FLAGEUL
