« Aujourd’hui en Alaska, si vous allez dans un bar de marins, ils sont presque surpris d’entendre qu’on ne boit et ne fume plus à bord », plaisante Jacob Thomas Tupper. Le sourire aux lèvres, le jeune homme découpe et propose aux visiteurs du Seafood Expo des morceaux du saumon produit dans la pêcherie familiale. Cru, évidemment. Son père se tient à ses côtés, commentant avec amusement la tendance des jeunes alaskiens : « en règle générale, ils quittent la pêcherie familiale à 18 ans, en disant qu’ils n’y reviendront jamais. Ils font leurs études et sont de retour vers 25 ans. » C’est ce qu’a fait son fils.
Mark Tupper a repris Triad Fisheries à la suite de Bruce Gore, et l’affaire s’est installée dans la famille. « Aujourd’hui, je suis sur les bateaux, mon père dirige, et ma mère s’occupe de la logistique » explique Jacob. En Alaska, la pêche reste une tradition familiale, « tous les enfants sont sur les bateaux à 12 ans », continue-t-il.
Mais tradition familiale ne signifie pas pêche traditionnelle. La pêche au saumon de Triad Fisheries s’est modernisée, afin de pouvoir proposer des poissons de qualité, issus d’une pêche durable et responsable. Et Jacob est là pour en témoigner, lui qui a passé plusieurs saisons à bord des bateaux familiaux, à pêcher du saumon royal et du Coho. « Nous pêchons à la ligne, durant des marées qui durent entre deux et trois semaines ». Les poissons sont transformés directement à bord. Vidés de leur sang, ils sont congelés sur le bateau à – 30°C. Puis tous les saumons sont étiquetés, un par un, permettant à chaque acheteur de connaître précisément la traçabilité du produit, notamment le lieu et la date de pêche. Le tout en un peu moins d’une heure trente. « Quand il n’y a pas de sang, n’y a pas de bactérie », assure le chef de famille. « Et quand ils sont congelés directement, comme sur nos bateaux, on évite un grand nombre de problèmes sanitaires. »
Des techniques de pêche qui permettent à Triad Fisheries de proposer un saumon de très haute qualité. « Sashimi grade », avancent le père et le fils. Et pourtant, Mark Tupper s’étonne : « j’ai cherché à proposer mon saumon dans les restaurants japonais des Etats-Unis qui voudraient proposer du poisson pêché de manière durable. Cinq ont répondu à l’appel. » Tous préfèrent le saumon d’élevage. « Même si les consommateurs sont de plus en plus intéressés par l’origine des produits » souligne le fils Tupper. Un créneau sur lequel se place la pêcherie. « L’important n’est pas le volume, mais la qualité », insistent-t-ils. « Et la durabilité ». Un point vital pour les deux hommes.
La bonne humeur règne sur le stand familial, alors que les deux posent bras dessus, bras dessous, assurant que la pêche en Alaska est plus qu’une industrie : « it’s a way of life ».
C.FAY