La Perle Blanche l’Excentrique de la maison Reynaud est produite en baie de Quiberon par 10 mètres de profondeur, loin de l’estran et de ses rangées de poches ostréicoles.
Une huître haut de gamme dont la coquille n’est pas travaillée : « ça pourrait être perçu comme un défaut mais pour nous, c’est une qualité : c’est ce qui lui donne sa forme dentelée, sauvage et si atypique », s’amuse Marie Guillemot, responsable marketing et communication de la maison Reynaud. Elle démarche poissonneries et restaurateurs depuis le lancement de la Perle Blanche l’Excentrique en 2018, qui a décroché la médaille d’argent au dernier Concours général agricole, et ça marche : « elle est très différente d’une huître bretonne non affinée » et se positionne sur le marché du haut de gamme, en complément de la Perle Blanche l’Originale, autre produit phare de la maison Reynaud. Mise en dégustation sur le carreau de Rungis, elle commence à se faire connaître. Proposée en bourriches de 48 pièces, les professionnels peuvent plus facilement l’essayer sans s’engager fortement, à la différence d’une commande de 96 pièces d’entrée de jeu qui exige un engagement plus élevé pour le client.
Cette huître creuse est élevée et emballée à la pointe de Kermancy, à La Trinité-sur-Mer, dans la baie de Quiberon. « Il est important pour nous de dissocier l’Excentrique de la catégorie des huîtres bretonnes, souligne Marie Guillemot, car nous ne sommes pas sur les mêmes gammes. » Son affinage en bassin la place dans une gamme premium, ce qui n’est pas le cas des huîtres bretonnes habituelles.
Il aura fallu deux ans pour mettre au point cette huître et garantir la constance de ses deux caractéristiques principales : sa forme et son goût. C’est en 2016, chez l’ostréiculteur Mickaël Tanguy, patron de l’entreprise Le Kermancy, que Julien Szwarcberg tombe sur « cette huître à la coquille très belle, très dentelée ». Il propose de la commercialiser et consacre deux années à trouver la bonne recette d’affinage. Cet ingénieur aquacole de la maison Reynaud teste les ingrédients et leur dosage jusqu’à trouver la bonne recette pour cette dernière étape avant la mise en bourriche, celle où l’huître prend son goût caractéristique. Cet affinage se fait en bassin avec un mélange de macroalgues, « un soin de thalasso » aime dire Julien Szwarcberg. C’est cette phase qui donne son goût final à l’huître : une note algale peu iodée. Pour la saison 2022-2023, il espère atteindre un volume de 40 tonnes pour cette huître fine, bien que charnue, qui sort du lot.
Un élevage en profondeur
Ce n’est pas dans une poche ostréicole que l’on dégotte la Perle Blanche l’Excentrique, mais au fond de la baie de Quiberon, par une dizaine de mètres de profondeur. Avec son bateau, l’équipe de l’ostréiculteur Mickaël Tanguy sème le naissain au sol. Au bout de trois années de croissance, elle récolte ensuite les huîtres de taille commercialisable à l’aide d’une drague. L’élevage en pleine mer, minoritaire en France, épargne aux huîtres d’être les unes sur les autres et d’être en compétition pour se nourrir et grandir. Déposées au sol en pleine mer, dans des eaux de bonne qualité conchylicole et environnementale – selon l’Ifremer – et riches en plancton, elles peuvent pousser à leur guise. C’est cette absence de contact entre elles qui permet à leur coquille de prendre la forme dentelée et violacée, caractéristique de l’Excentrique. Cette huître creuse fait partie des fines avec moins de 10,5 % de taux de chair. Pour autant, elle est charnue pour une huître de cette catégorie.
Mickaël Tanguy capte son naissain en Charente pour l’élever ensuite sur ses parcs en baie de Quiberon. Lors de la récolte, toutes les huîtres sont stockées dans de grands bacs à bord du bateau. C’est à terre qu’elles sont triées. Celles à la coquille en dentelle sont sélectionnées. Vient ensuite l’étape du trompage, une phase où les huîtres sont placées sur l’estran pour qu’elles découvrent les marées et apprennent à se fermer lorsqu’elles sont émergées. Enfin, arrive l’affinage qui leur donne leur goût et les place dans la catégorie du haut de gamme.
Julie LALLOUËT-GEFFROY