Le groupe Labeyrie Fine Foods a investi 18 millions d’euros dans son usine de Saint-Aignan-de-Grandlieu (Loire-Atlantique), afin de suivre la croissance du dynamique marché de la crevette… et de voir plus loin. Performance industrielle, qualité, RSE mais aussi innovations et ambitions à l’export sont au programme.
Le 5 février dernier, c’est dans la joie que les équipes de Labeyrie Fine Foods ont inauguré le site Delpierre de Saint-Aignan-de-Grandlieu. Situé à deux pas de l’aéroport Nantes-Atlantique, le vaisseau amiral des crevettes du groupe a bénéficié de 18 millions d’euros d’investissement. La moitié correspond à une extension de 3 350 mètres carrés, portant la surface bâtie totale à 11 500 mètres carrés. De nouveaux équipements représentent l’autre moitié. Le site s’est en particulier doté de deux nouvelles lignes OctoFrost, qui décongèlent, cuisent en continu par aspersion, puis refroidissent les crevettes. « Entre le dépotage et la sortie du produit fini, il s’écoule désormais moins de 30 minutes, contre 24 heures auparavant, se réjouit Élodie Tessereau, directrice du site. La cuisson étant plus régulière, cela permet aussi d’améliorer la qualité des crevettes. » L’ancienne ligne, qui fonctionnait en discontinu (par batch), reste toutefois en activité pour cuire les couronnes de crevettes. L’ergonomie et la sécurité du site ont été améliorées. Dans l’atelier conditionnement, trois nouvelles lignes automatisées d’approvisionnement en cartons ont ainsi été ajoutées.
Pour ce sacré coup de jeune, il aura fallu un an et demi de travaux (entre fin 2022 et mai 2024) et seulement 15 jours de fermeture. Partie de 700 tonnes par an dans les années 1980, l’usine était complètement arrivée à saturation avec 7 000 tonnes de production annuelle. Les travaux permettent de voir beaucoup plus grand, la capacité passant à 18 000 tonnes. « C’est le plus beau site dédié aux crevettes en Europe, revendique Jacques Trottier, président du groupe Labeyrie Fine Foods. Nous souhaitons allier compétitivité – avec les meilleurs prix de revient en Europe –, innovation, production locale et attractivité pour les salariés. L’investissement s’inscrit dans un plan global très ambitieux. »
Côté débouchés, les perspectives sont prometteuses. « La crevette est l’une des protéines les plus accessibles et consensuelles des produits de la mer », souligne Stéphanie Pargade, directrice de la business unit Labeyrie Fine Foods Océan. Longtemps cantonnée en entrée, consommée avec de la mayonnaise, « la crevette a vu son usage se diversifier largement ces dernières années, en particulier grâce à l’essor de la cuisine ethnique. C’est un produit facile à remettre en œuvre au quotidien, tout en ayant un effet “waouh” », observe Stéphanie Pargade. Elle estime le marché français de la crevette à 65 000 tonnes, tous réseaux confondus. Sur ce total, 13 800 tonnes correspondent à des crevettes gencodées (entières ou décortiquées), vendues en GMS. « Leur croissance a été de 50 % en cinq ans, ce qui est considérable. Plus les crevettes sont élaborées, plus le consommateur est jeune. » Delpierre est la marque leader sur les crevettes élaborées, avec 38 % de part de marché en valeur (50 % au moment des fêtes) et 31 % en volume. « Ce leadership est le fruit d’un savoir-faire historique, avec le consommateur au cœur », souligne Stéphanie Pargade. Souvent pionnière, la marque a notamment été la première à lancer des couronnes de crevettes avec sauce, des crevettes à poêler ou, dernièrement, des crevettes à cuisiner. « Nous voulons continuer à écrire l’histoire de la marque mais aussi des produits de la mer en France », affirme Stéphanie Pargade. L’ancienne partie de l’usine dédiée aux crevettes décortiquées reste pour le moment vierge. « Nous allons pouvoir continuer à innover et aller plus loin dans l’élaboration et les recettes », sourit Stéphanie Pargade. Autre horizon à ouvrir : le développement des ventes de crevettes en proche export, alors que l’international n’est pas encore très développé. Actuellement, le site produit à 80 % pour les GMS (marque Delpierre, MDD et vrac pour le banc marée) et à 20 % pour l’export, le food service et les circuits spécialisés.
Les récents investissements intègrent une forte dimension RSE. Changement des gaz frigorigènes et mise en place d’un système de récupération de la chaleur fatale permettent d’abaisser de 20 % la consommation d’énergie au kilo de crevettes et de diminuer les émissions de gaz à effet de serre. « Nous sommes convaincus de l’alliance de la qualité et de la durabilité », explique Gaëlle Ouari, directrice de la RSE, communication et stratégie des marques de Labeyrie Fine Foods. La démarche s’applique également en amont : « Certification ASC de toutes les crevettes, panneaux solaires dans les élevages, programme pour préserver la biodiversité des mangroves, aliment avec du soja garanti zéro déforestation, prise en compte du bien-être de la crevette, amélioration des méthodes d’abattage, etc. »
En 5 ans, Labeyrie Fine Foods a investi pas moins de 100 millions d’euros dans ses différentes usines. « Nous voulons incarner le réveil des IAA en France, assure Jacques Trottier, président du groupe. Il n’y a pas de souveraineté industrielle, il n’y a que des preuves de souveraineté industrielle. Il faut cesser d’en parler… et le faire ! » Détenu par le groupe coopératif Lur Berri et le fonds d’investissement PAI Partners, Labeyrie Fine Foods a financé les 18 millions d’euros sur sa trésorerie propre et bénéficié de 2,8 millions d’euros dans le cadre du plan France Relance. Le groupe totalise 867 millions d’euros de CA. Il est structuré en quatre business units : Premium (242 millions d’euros de CA), Océan (192 millions d’euros), Trendy (155 millions d’euros) et UK (278 millions d’euros). Sur la douzaine de sites industriels du groupe, six sont dédiés aux produits de la mer. Saint-Aignan-de-Grandlieu (crevettes et crustacés), Fécamp (poissons fumés et élaborés) et Jonzac (cabillaud, poissons élaborés, plats cuisinés marins) sont rattachés à la BU Océan. Saint-Geours-de-Maremne (saumon fumé) appartient à la BU Premium. Les sites britanniques de Duns (saumon fumé) et Warminster (crevettes et crustacés) sont rattachés à la BU UK.
Fanny ROUSSELIN-ROUSVOAL