Mytilimer ambitieux et innovant grâce à Kerbone

Le 04/11/2024 à 16:20 par La rédaction

Mytilimer, leader hexagonal de la mytil iculture, a inauguré en septembre Kerbone. Cet outil de pointe s’inscrit dans une logique à la fois environnementale, sociétale et d’innovation. Toutes les moules, y compris sous-taille, sont valorisées. Les « cocottes » cuisinées font déjà un carton.

« On l’a fait ! » Les dirigeants et les salariés de Mytilimer, les représentants des pouvoirs publics venus en nombre et les partenaires bancaires ne cachaient pas leur fierté et leur joie en ce 13 septembre. C’est dans cette atmosphère souriante, sous un grand soleil, que le nouveau bâtiment Kerbone a officiellement été inauguré à Cancale, après 15 mois de travaux. L’infrastructure de pointe est dédiée à la commercialisation, la transformation et la valorisation des moules. Implantée sur un terrain de 3,6 hectares, elle comprend 6 500 mètres carrés de bâtiments : 4 000 pour l’espace de production, 1 500 pour l’emballage, la préparation et les locaux techniques, 1 000 pour le siège et les fonctions administratives. Deux des points forts du site résident dans un atelier innovant de valorisation des moules sous-taille et une ligne de moules élaborées. « Kerbone, c’est bien plus qu’un projet, c’est la concrétisation de nos valeurs », explique Caroline Beaulieu, présidente. Le site revendique une moindre empreinte écologique, le bien-être des salariés (et des moules !), de multiples innovations et une qualité irréprochable.

Le bonheur était d’autant plus intense qu’il contraste avec un drame survenu quelques mois plus tôt. Le 25 mars, un incendie avait ravagé l’ancien bâtiment. N’en restent que des vestiges, toujours visibles. La production avait dû être arrêtée pendant un mois et la mise en service de Kerbone avancée.

Le nouveau vaisseau amiral de Mytilimer représente un investissement de 15 millions d’euros, en partie financé par Breizhimmo, le dispositif de portage immobilier de la Région Bretagne et par la Banque des Territoires. Loïg Chesnais-Girard, président de la Région Bretagne, a salué le bilan carbone (presque, NDLR) négatif des moules et  la contribution de Kerbone à la souveraineté alimentaire. Le préfet Philippe Gustin s’est réjoui du projet, « alors que la Bretagne est parfois un peu faible dans la valorisation des produits alimentaires ».

Valoriser toutes les moules est au cœur du projet Kerbone, notamment grâce à un atelier très novateur dédié aux moules sous-taille. « Même si les mytiliculteurs travaillent à abaisser ce taux, 20 à 25 % des moules n’arrivent pas à maturité et n’atteignent donc pas la taille commercialisable de 4 centimètres minimum », rappelle Christophe Le Bihan. Jusqu’ici, ces moules hors calibre étaient dispersées sur l’estran, une solution peu satisfaisante tant d’un point de vue écologique qu’économique. Un procédé d’hydrolyse enzymatique permettra désormais de valoriser cette manne. Développé par Mytilimer depuis 2014 et breveté en 2018, il est encore en phase de test mais devrait bientôt être totalement opérationnel. Son principe : une cartouche d’air comprimé envoie les moules hors calibre en hauteur. Elles retombent ensuite dans une cuve où elles sont chauffées en présence d’enzymes. Ce procédé permet d’obtenir d’un côté des coquilles parfaitement propres – totalement dépourvues de matière organique – et de l’autre, un jus protéique (mélange d’eau et de chair de moules), à 8 % de matière sèche. Les coquilles sont mises en big bag et trouveront une seconde vie dans des écomatériaux pour le BTP ou les montures de lunettes. L’hydrolysat, lui, est ensuite concentré sur site pour arriver à une teneur finale en matière sèche entre 30 et 40 %. Ses applications sont variées : arômes alimentaires, pet food, alimentation animale, compléments alimentaires ou cosmétiques.

Mais bien sûr, les moules commerciales restent au centre de l’activité. Les deux principaux labels sont l’AOP Moules de bouchot de la baie du Mont-Saint-Michel et le Label Rouge ainsi que, dans une moindre mesure, des moules STG et bio. À l’arrivée, le respect du cahier des charges est vérifié et les moules éventuellement surclassées ou déclassées. Deux quais de réception permettent d’accueillir les moules, qu’elles soient brutes ou prélavées chez le producteur. « Au total, le site peut traiter 6 tonnes de moules par heure en lavage », indique Aliénor de Gouberville, cheffe de projet industriel. Les cadences ont été multipliées par cinq ou six par rapport au site précédent.

Les moules de taille commerciale peuvent suivre deux parcours différents au sein de l’usine. Une partie est dédiée à la gamme barquettes : 1 kilogramme (y compris en boîte carrée type boîte de bonbons), 2 kilogrammes et, depuis récemment, 5 kilogrammes. Ce format destiné aux restaurateurs remplace le conditionnement en sac et permet de gagner deux à trois jours de DLC. L’autre partie des moules sera traitée sur la ligne parallèle, en cocottes. Elles y sont précuites en autoclave. Lancées en juillet 2024, les cocottes de moules cuisinées et micro-ondables à marque La Cancalaise (version crème d’Isigny ou marinière) dépassent déjà toutes les espérances. « Nous avions prévu d’en écouler 1 million d’unités par an, ce sera sans doute le double, voire le triple », se réjouit Christophe Le Bihan. Très pratique, le produit séduit notamment les jeunes et les anciens. Installé dans son nouveau vaisseau amiral, Mytilimer fourmille déjà de projets. Parmi les plus évidents : développer de nouvelles recettes de moules cuisinées. Le groupe recherche par ailleurs un autre coquillage ou crustacé à valoriser de janvier à juin (hors saison de la bouchot). « Un partenariat enthousiasmant » serait déjà dans les tuyaux avec une entreprise irlandaise spécialisée dans les moules de filière. D’ici deux ou trois ans, plusieurs autres ateliers Mytilimer pourraient rejoindre Kerbone. Les produits sont déjà centralisés sur place : ceux de la conserverie de Cancale (tartinables, soupes, rillettes), de l’atelier de fumaison de Vitré et de l’atelier élaboré de Challans. 80 emplois supplémentaires sont projetés d’ici quatre ou cinq ans.

Gilles Lurton, président de Saint-Malo Agglomération, rappelle de son côté qu’il reste des terrains raccordés à l’eau de mer sur la zone du Vouhariot. Avis à ceux qui voudraient avoir comme voisins Mytilimer, le groupe Boutrais ou encore C-Weed.

 

Fanny ROUSSELIN-ROUSVOAL

 

Retrouvez l'intégralité du reportage dans le magazine Produits de la mer n°227

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