« Faire parler » les otolithes et les gonades de poisson, c’est la mission très pointue d’HalieuMer. Ce bureau d’études scientifiques créé il y a un an à Arzon est a priori le seul à exercer cette activité en France. « Ces analyses fournissent des données utiles à la gestion des pêches », explique sa fondatrice Elizabeth Laman Trip, docteure en biologie marine. Sa spécialité est la démographie des poissons : âge, croissance, durée de vie, reproduction, éventuel changement de sexe, structure d’âge des populations… Au total, elle a passé plus de 20 ans à l’étranger (Australie, Nouvelle-Zélande ou Arabie saoudite), où elle est devenue enseignant-chercheur et peaufine son expertise de différents biotopes ou espèces. En 2022, retour dans le Morbihan, berceau de sa famille maternelle.
À Arzon, plusieurs microscopes équipent le bureau d’HalieuMer. L’objet d’attention ressemble, lui, à des sortes de demi-grains de riz. Ce sont des paires d’otolithes ! Ces petits os de l’oreille interne sont situés sous le cerveau des poissons (sauf les requins et les raies) et leur permettent de s’équilibrer dans la colonne d’eau et de connaître leur vitesse. « Il y a 25 ans, on utilisait les écailles pour estimer l’âge des poissons. Mais les otolithes sont beaucoup plus fiables », précise la spécialiste. Une fois le nucleus coupé en tranche fine, direction le stéréo-microscope à lumière variable. « La sclérochronologie consiste à compter les anneaux, un peu comme on le fait sur les troncs d’arbre. » Sur chaque otolithe, il y a un anneau par jour pendant la première année de vie, ensuite on compte en années. Le type de cristallisation fournit par ailleurs des indicateurs de bien-être animal, avec des applications potentielles en aquaculture. Pour les gonades (ovaires ou testicules), Elizabeth Laman Trip travaille sur les images ou lames fines envoyées par des centres de recherche. Objectif : déterminer, entre autres, à quel âge les poissons sont sexuellement matures. Une fois rentrées dans des modèles halieutiques, ces données permettent de connaître l’état de santé des populations.
Fanny ROUSSELIN-ROUSVOAL