Nouvelle taxe
Pour financer le plan de relance lié à la crise Covid-19, le Conseil européen a pris des mesures d’urgence le 21 juillet 2020. La première d’entre elles apparaît au point 146 de l’annexe des conclusions. Il s’agit d’une taxe au poids sur les déchets d’emballage en plastique non recyclés, de 80 centimes par kilo, soit 800 euros la tonne. Elle sera applicable le 1er janvier 2021. Un mécanisme visant à « éviter un effet excessivement régressif sur les contributions nationales » limitera la facture pour les pays les moins riches.
La France en retard
Compte tenu des performances actuelles de recyclage du plastique, la facture est évaluée à 1,27 milliard d’euros pour la France. Cela ferait de l’Hexagone le deuxième contributeur, derrière l’Allemagne (1,33 milliard). Selon PlasticsEurope (qui représente les producteurs européens de matières plastiques), la France n’a recyclé que 26 % de ses déchets d’emballages plastiques en 2016. 45 % ont été incinérés et 29 % enfouis. Pour comparaison, au niveau de l’Union européenne, 40,8 % des déchets d’emballages en plastique sont recyclés.
L’idée de taxer les plastiques n’est pas nouvelle. Elle avait été émise dès janvier 2018 par la Commission européenne, pour compenser la perte de la contribution britannique après 2020 (entre 12 et 14 milliards d’euros par an). Elle a ensuite été écartée dans le cadre de la directive sur les plastiques à usage unique (SUP) du 5 juin 2019, au profit de l’interdiction de certains produits (pailles, touillettes, cotons-tiges, etc.), d’objectifs de collecte et de filières à responsabilité élargie du producteur (Rep).
Elipso, l’association professionnelle représentant les fabricants d’emballages plastiques en France, estime que la nouvelle taxe est « cohérente avec les objectifs d’économie circulaire » et souligne que, mécaniquement, « toute hausse du recyclage des emballages fera baisser sensiblement la contribution française ».
Qui va payer ?
Les dispositions restent à ce stade au niveau des grands principes. Mais la question de savoir qui va payer se pose d’ores et déjà. L’État pourrait en répercuter le coût sur les collectivités territoriales, compétentes pour la gestion des déchets, sur les éco-organismes (lesquels se retourneraient ensuite vers les collectivités locales), ou encore sur les metteurs en marché (avec une probable retombée de cette nouvelle charge sur les consommateurs). « C’est selon nous, et au vu de la rédaction des conclusions, sur les gestionnaires de déchets que la taxe devrait s’appliquer », estime Plastalliance, syndicat représentatif de la plasturgie et des composites.
Seule une fraction des flux de déchets d’emballages plastiques est pour le moment suivie avec précision, depuis la mise sur le marché (emballages) jusqu’à la fin de vie (déchets d’emballages). Il s’agit de celle de la filière Rep des emballages ménagers. Sur les filières hors Rep des emballages professionnels (restauration, industrie, commerce), la visibilité est moindre.
Malus et super malus
Selon Take a Waste – start-up de l’économie sociale et solidaire créée en 2018 pour accompagner les entreprises vers le zéro déchet –, une application de la taxe en plusieurs temps est probable : rapidement sur les emballages ménagers, et à plus long terme pour les emballages professionnels. Une mesure simple serait d’imaginer un « super malus » pour les emballages en plastique non recyclables. Actuellement, le malus maximum qui leur est appliqué double leur contribution à la filière emballage. Autre piste envisageable : faire contribuer le plastique vierge à la taxe européenne et en exonérer le plastique recyclé. La solution s’avèrerait simple à appliquer (puisque seuls les plasturgistes y seraient assujettis), mais s’éloigne de l’esprit du texte original. Take a Waste envisage également l’option d’une nouvelle hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).
Fanny ROUSSELIN-ROUSVOAL
Les déchets plastiques dans le viseur de l’Union européenne depuis 2018 |
La directive 2018/851, révisant la directive-cadre sur les déchets (2008/98/CE), mentionne l’obligation de collecter séparément les déchets plastiques des ménages. La directive 2018/852, relative aux emballages et déchets d’emballages, introduit un objectif de recyclage des emballages plastiques de 50 % en 2025 et 55 % en 2030. La directive 2019/904, dite « directive single-use plastics (SUP) », interdit la mise sur le marché de certains plastiques à usage unique, oblige au suivi et au marquage d’autres plastiques à usage unique, fixe des objectifs d’incorporation de plastique recyclé aux bouteilles PET, ainsi que des objectifs de collecte séparée de ces mêmes bouteilles. La taxe sur les emballages plastiques non recyclés complète et renforce les dispositions existantes. C’est la première mesure à caractère financier. |