Veramaris : l’huile qui bonifie le saumon

Le 18/06/2019 à 10:12 par La Rédaction

 

 

[Un projet ambitieux]

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L’idée
L’huile issue d’une microalgue marine, très concentrée en EPA et DHA, vise à répondre à la demande croissante de l’aquaculture en acides gras oméga 3, pour réduire sa dépendance en huile de poisson sauvage. Mais aussi à garantir au consommateur des produits nutritifs. « Notre huile d’algue marine naturelle relève le défi de nourrir une population mondiale croissante sans épuiser les précieuses ressources naturelles », avance Karim Kurmaly, qui dirige la société Veramaris basée à Delft, aux Pays-Bas.

La R & D
La mise au point de cette « technologie de rupture », comme la qualifie Veramaris,
« est le résultat de plusieurs années de recherche, souligne Gaëlle Husser. Nous avons bénéficié des compétences de DSM sur les souches d’algues et d’Evonik pour construire et mettre en fonctionnement l’usine de Blair ». Loin d’une simple substitution, intégrer l’huile dans l’aliment a aussi nécessité des années de recherche, en partenariat, souligne le fabricant Skretting.

Le marché
Si les premiers débouchés sont dans la salmoniculture, « ça peut être une alternative en fourniture d’EPA et de DHA pour toute l’industrie aquacole, avec un bénéfice nutritionnel pour le consommateur final, souligne Gaëlle Husser. Et dans le petfood, avec un bénéfice pour la santé de l’animal. »

 

Ce projet qu’annonçait PDM il y a deux ans est désormais abouti. Veramaris, société créée en 2018 par DSM et Evonik à parts égales, produit de l’huile riche en oméga 3 à partir de la microalgue marine Schizochytrium. Une offre située sur le même créneau que la poudre issue de Schizochytrium, AlgaPrime DHA, proposée par Biomar.

L’huile de Veramaris contient plus de 50 % d’EPA (acide eicosapentaénoïque) et de DHA (acide docosahexaénoïque). « Elle est sur le marché, des pionniers l’utilisent », confirme Gaëlle Husser, directrice du développement. Depuis octobre 2018, la ferme aquacole norvégienne Lingalaks nourrit la moitié de ses saumons avec un aliment de Skretting intégrant cette huile. Ceux-ci présentent bien des taux élevés d’EPA et de DHA. Depuis début 2019, ce poisson est commercialisé par le détaillant allemand Kaufland (groupe Schwarz, qui possède aussi Lidl). Des nutritionnistes et scientifiques de Veramaris ont aidé ces éclaireurs à optimiser les régimes.

L’huile est produite en Caroline du Sud et en Slovaquie, et une grande usine est en finition à Blair, dans le Nebraska. « Près de 200 millions de dollars (179 millions d’euros) y ont été investis. Nous sommes dans les temps, nous pourrons inaugurer le site cet été », se félicite Gaëlle Husser. La capacité de production ? « Elle correspondra à 15 % de la quantité d’EPA et de DHA dont le marché de la salmoniculture a besoin. » Veramaris affiche son ambition.

La microalgue, une souche naturelle (non-OGM) de Schizochytrium, se multiplie par fermentation, de façon exponentielle. « Ça ressemble au processus de la bière, illustre Gaëlle Husser. L’algue a besoin de carbone. Selon le site, le sucre provient de plantes différentes : canne à sucre et maïs aux États-Unis, betterave et blé en Europe. » Les algues convertissent le dextrose en acides gras oméga 3 qui s’accumulent dans des vésicules. Puis les parois cellulaires sont cassées et les vésicules d’huile séparées de la phase aqueuse. L’eau résiduelle est éliminée par centrifugation, donnant l’huile d’algue concentrée, stabilisée avec des antioxydants naturels (sans éthoxyquine). Pas de déchet : le coproduit liquide peut servir comme source de protéines pour le bétail ou être converti en biogaz pour produire de l’électricité.

Veramaris met en avant plusieurs atouts. Pour le fabricant d’aliments : la viscosité de l’huile, similaire à celle de l’huile de poisson, permet de l’intégrer aux process existants. Les spécifications et la disponibilité du produit ne fluctuent pas. Pas de risque non plus de contaminants marins (PCB, dioxine) : « C’est un procédé fermé, nous contrôlons ce qui entre et sort », appuie Gaëlle Husser. Du côté des aquaculteurs, la forte teneur en EPA et DHA bénéficie à la croissance et à la santé du poisson. Et sa richesse nutritive, régulière et normalisée, est un argument auprès du consommateur final, pour la prévention de maladies (cardiaques, cancers, arthrite). Veramaris l’a vérifié par une enquête : les plus gros consommateurs de saumon sont ceux qui se soucient le plus de sa teneur en oméga 3. Il y a donc un intérêt clair à se différencier en valorisant cet atout santé par l’étiquetage.

La société compte sur les clients de ses clients pour impulser le changement : elle a confié à Via Aqua la mission de sensibiliser des acheteurs de la grande distribution dans l’Union européenne (Italie, Allemagne, France, Pays-Bas, Espagne et Angleterre). Cette démarche n’a rien d’incongru quand on voit qu’un distributeur comme Auchan est le premier à défendre l’introduction de farine d’insectes dans l’aliment aquacole.

Solène LE ROUX

 

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