La couleur bleue de l’anorak et l’outil pourraient porter à confusion, vu de loin : non, ce n’est pas un agent des Af’mar’ qui traque du hors taille ! Raïssa Tesseron échantillonne ces Pecten pour évaluer la proportion de belles tailles. Normandie Fraîcheur Mer (NFM), siglé sur le vêtement, est l’association qui l’emploie depuis 2004. Elle est agent qualité – ou qualiticienne – basée à la halle à marée de Cherbourg-Cotentin, l’une des quatre criées du groupement qualité normand.
La mission n’est pas de même nature et les relations humaines induites non plus : la jeune femme n’est pas là pour sanctionner des pratiques illégales. Audit, conseil, contrôle qualité et formation s’enchaînent tous les mois, et ce travail varié la passionne : « Je suis à l’aise sur le terrain, à commencer avec le produit. La nuit, l’activité est en pleine effervescence sous la halle, à la débarque, au tri. Le contact est privilégié avec les pêcheurs, employés, puis les mareyeurs », s’enthousiasme Raïssa, gentiment surnommée « la dame de la qualité » par l’un de ces professionnels, admiratif. Les relations sont à l’évidence très respectueuses et fructueuses : la finalité de son travail est d’améliorer leurs pratiques, pour optimiser et valoriser la qualité.
Comme ses deux collègues techniciens de NFM – Dominique Lamort à Port-en-Bessin et Adeline Denizot à Granville –, elle accompagne et conseille, en faisant œuvre de pédagogie. Elle excelle aussi dans ses cours auprès des futurs pêcheurs du lycée maritime, ou de son ancien établissement, Intechmer : elle y avait obtenu, en formation continue, une licence pro.
Originaire de la Charente-Maritime, où elle a passé sa jeunesse « les pieds dans l’eau, à La Cotinière », elle avait d’abord décroché un brevet de technicien agricole (BTA) aquacole au lycée de la mer de Bourcefranc, complété d’un DU de technicien aquacole au Creufop de Sète. Puis, immersion dans la vie active, au cours d’une décennie d’emplois variés, en écloseries, établissements ostréicoles, aquariums et poissonneries, avant de reprendre le chemin du Creufop et de se perfectionner en tant que chef de projet en aquaculture et halieutique.
« Dans les pas nocturnes de Raïssa, la marée normande devient une leçon de choses magique » note, élogieux, Jacky Durand, le subtil chroniqueur « food » du quotidien Libération. Ultime talent, et non des moindres, « la dame de la qualité » accomplit aussi un travail remarquable de communication, fondamental pour la pêche française.
Texte et photo : Lionel FLAGEUL
