Savez-vous planter les choux ? À la mode de l’Inra (Institut national de la recherche agronomique), on les plante en aquaponie avec des truites arc-en-ciel, élevées dans le pilote en recirculation d’eau de la station expérimentale de Sizun, en centre-Finistère. Étonnant retour aux sources pour son directeur Laurent Labbé, issu du milieu agricole de la Haute-Marne.
Diplômé d’un BTS agricole, il se passionne pour l’aquaculture en découvrant les débuts de la crevetticulture en Équateur à l’occasion d’un voyage en Amérique latine. Lorsqu’il retourne en France, il obtient en 1990 un certificat d’aquaculture et travaille dans un élevage de truites à Valence. Il devient, dès 1991, responsable de l’élevage de la station de Sizun créée 5 ans plus tôt pour les salmonidés. Les recherches s’orientent sur la seule truite en 2004, lorsque l’Ifremer se retire. Laurent Labbé, ingénieur de recherche, est nommé directeur et assure le délicat passage de la restructuration. « Je suis passé des bassins à l’ordinateur. Mais j’y retourne souvent », dit-il. Son bureau a vue sur les 400 cuves où s’ébattent les 45 000 truites cobayes veillées par une douzaine d’agents qui couvrent d’éloges leur « chef », adepte des méthodes de management aussi douces qu’efficaces.
Régulièrement, l’équipe accueille des chercheurs français et européens du réseau AquaExcel. Laurent Labbé apprécie ce brassage scientifique, très fécond. D’Écosse, de Suède ou de Norvège, des nutritionnistes, physiologistes ou généticiens viennent mettre en place à Sizun des études interdisciplinaires, notamment sur l’alimentation alternative. Ainsi, une lignée de truite 100 % végétarienne a été sélectionnée. Un nouveau programme, avec Le Gouessant, va tester des farines d’insectes, micro-algues et levures.
Plus généralement, la station essaye des systèmes d’élevage innovants, en phase avec les normes environnementales croissantes. Le pilote de recirculation, de 10 cuves et deux biofiltres, exige 10 fois moins d’eau que le système classique ouvert. Il a été mis au point par Laurent, l’ingénieur ingénieux, et son équipe. L’avenir de l’élevage des truites – le seul qui progresse en France – passe sans aucun doute par Sizun, grâce à ces chercheurs appliqués, tels Laurent Labbé, capables de répondre aux questions de la filière professionnelle.
Texte et photos : Lionel FLAGEUL