Campagne de publicité toute en couleur, investissements massifs dans l’usine quimpéroise… Depuis son arrivée à la direction générale de Saupiquet en mai 2012, Armand Baudry a su afficher ses ambitions pour le secteur de la conserve de poisson, convaincu que cette protéine très peu chère doit trouver un public de plus en plus large dans cette période de crise.
INTERVIEW
Question 1. En 2013, la conserve de poisson a fêté ses 200 ans. Cet anniversaire s’est présenté sous quels auspices ?
En termes de chiffre d’affaires, le marché des conserves de poisson a progressé de 4,7 %. Une hausse essentiellement due à un effet prix car les volumes ont, eux, diminué. Selon moi, la hausse du prix de vente moyen est liée pour partie à l’inflation et pour une autre à une amélioration du mix produit.
De fait, notre secteur a connu depuis deux ans des hausses de prix de matières premières particulièrement importantes sur le thon, le maquereau ou les sardines. Comme le poisson représente 50 à 60 % du coût de revient d’une boîte de conserve, nous n’avons eu d’autres choix que d’en répercuter une partie. Mais pas tout. Enfin, les grandes surfaces qui ont fait de leur image prix une arme de combat n’ont pas toujours répercuté la hausse aux clients finaux.
Les conséquences pour le secteur : la profitabilité baisse alors même que la crise économique devrait marquer une période favorable pour la conserve de poisson. Malgré les hausses, les boîtes de thon, de sardines ou de maquereaux restent les protéines les moins chères qui existent, celles que tout le monde a toujours au fond de son placard. Il faut aller chercher de nouveaux consommateurs.
Question 2. Comment ? Les innovations, les changements de mix produit ont certes permis à la catégorie de progresser en valeur mais pas en volumes. Or c’est au regard de cet indicateur que l’on peut estimer qu’un marché séduit ou non de nouveaux clients ? Non ?
Je tiens quand même à rappeler que le marché de la conserve de poisson est assez sensible à la météo. Les ventes ont tendance à augmenter l’été. En 2013, l’été et le soleil sont arrivés très tard. Un effet qui vient corriger négativement ceux de la dynamique d’innovation du secteur dont les parties prenantes font tout pour augmenter les cibles consommateurs. C’est encore plus vrai pour Saupiquet, car le taux de pénétration des conserves de maquereaux dans les foyers français reste inférieur à ceux de la conserve de sardines et de thon. Et l’innovation est payante. Avec la gamme du maquereau au naturel, la croissance a été au rendez-vous : + 12 % en deux ans. Nous espérons, avec la gamme des grillés, convaincre les non-consommateurs de maquereaux en boîte de s’y essayer. Avec ces deux gammes, nous levons un frein à la consommation et un autre à la production pour les marchés internationaux puisqu’il n’y a pas de sauce.
Question 3. Introduire des innovations nécessite des investissements lourds. En plus de ceux consentis dans la R & D, dans l’adaptation des lignes, il faut communiquer. Comment faire quand les marges fondent ?
Il faut y croire. Se dire qu’un consommateur acceptera des hausses si la qualité et la nouveauté sont au rendez-vous. Communiquer sur les écrans télévisés est une obligation pour être visible et efficace en magasin. Pour le reste, nous investissons dans les usines avec une perspective de retour sur investissement sur 15 ans. Nos derniers investissements dans l’usine de Quimper ont été réalisés pour permettre à nos salariés de travailler dans de meilleures conditions. L’ergonomie est un facteur de rentabilité. Mis dans de bonnes conditions de travail, nos salariés limitent les pertes de matière première, dont la hausse des cours est structurelle.
Malgré tout, j’espère que nous pourrons réussir à faire grimper les prix de vente moyens des conserves de poisson. La France est le pays où les conserves de thon sont les moins chères d’Europe. Il faut que nous réussissions à évoquer davantage la construction de catégories avec la grande distribution et un peu moins de prix.
Question 4. La dureté des négociations commerciales est-elle la même avec les acteurs de la restauration hors domicile ?
Non. Nous réalisons 20 % de notre chiffre d’affaires en RHD où les acheteurs sont plus ouverts que ceux de la grande distribution à d’autres discours que celui des prix. La facilité d’utilisation, la chaîne d’approvisionnement les intéressent et, surtout, ils sont plus réactifs pour s’adapter aux cours des matières premières. Les négociations ne figent pas les prix pour toute une année.