Les algues, un marché en plein essor

Le 30/05/2023 à 8:19 par La rédaction

Utilisées comme ingrédient, complément alimentaire ou « légume de la mer », les algues – de culture ou de récolte – s’inscrivent en plein dans la transition alimentaire. Elles répondent à la volonté de végétaliser son alimentation tout en présentant de nombreux atouts nutritionnels. Retrouvez les témoignages d’une filière dynamique qui se mobilise.

En mars 2015, dans le cadre du projet IDEALG, le pôle halieutique de l’Institut Agro (à l’époque Agrocampus Ouest) de Rennes s’est intéressé au marché des macroalgues et à son potentiel de développement. Le pôle identifiait alors plusieurs plats ou produits porteurs pour les algues, sur lesquels « les industriels devraient concentrer leurs efforts de R&D » : les tartinables et biscuits apéritifs, les soupes et salades, et les sauces. Le même rapport identifiait deux consommateurs types de produits contenant des algues. Le premier est un consommateur tourné vers la gastronomie asiatique, plutôt jeune et client régulier des GMS. Le second, qui est d’ailleurs plutôt une consommatrice, est attaché à la gastronomie française et davantage client des magasins bio. Parmi les attentes des consommateurs vis-à-vis des algues, on retrouve des arguments de santé et de nutrition, ainsi qu’une volonté de diversifier son alimentation. Mais ce qui limite la consommation d’algues aujourd’hui, c’est surtout un manque de connaissances sur les produits. Ceux qui tireront (voire qui tirent déjà) leur épingle du jeu sont ceux qui sont prêts à l’emploi, répondent à un besoin et à une attente de naturalité, mais aussi qui n’ont pas un goût clivant. Un véritable défi d’équilibriste pour l’ensemble de la filière…

Éric Philippe, coprésident de l’association Merci les Algues – qui a vocation à fédérer et promouvoir la filière – rappelle les vertus écologiques de la production d’algues : « C’est une production sans intrants, sans eau, sans engrais, qui absorbe du carbone et purifie les eaux. » Martial Laurans, chercheur à l’Ifremer, rappelle les services écosystémiques rendus par les algues : production alimentaire, biens culturels, support de biodiversité, absorption de carbone et maintien de l’équilibre des écosystèmes côtiers. Les atouts nutritionnels sont également soulignés par Hélène Marfaing, cheffe de projet agroalimentaire et nutrition au sein du Ceva (Centre d’études et de valorisation des algues) : « Certaines microalgues comme la spiruline sont riches en protéines et en fer. Pour les macroalgues, on retrouve une composition proche de certains légumes : riches en fibres, antioxydants et minéraux. » Autant d’atouts qui peuvent séduire les consommateurs.

En parallèle, les algues sont soumises à de nombreuses pressions : la récolte qui, si elle n’est pas gérée correctement, peut entraîner la surexploitation, la pollution du littoral et le changement climatique. « Certaines projections montrent des montées de températures dans certaines régions qui seraient alors trop chaudes pour les laminaires, prévient Martial Laurans. On l’observe à l’est de la baie de Saint-Brieuc, par exemple. Mais la récolte est bien gérée par un système de licences, de quotas et de taille réglementaire de récolte. » Toute analogie avec la pêche ne saurait être fortuite…

Ingrédients ou « légumes » ?

Encore faut-il valoriser ces produits sains, qui peuvent avoir une dimension durable. Marie-Loïc Garin, directrice du Centre culinaire conseil de Rennes, cheffe de projet R&D et ingénierie culinaire, distingue deux usages des macroalgues : source d’ingrédients fonctionnels (texturants notamment) ou source de matière première alimentaire brute. Les débouchés sont multiples : nutraceutique, cosmétique, alimentation humaine, alimentation animale, amendement des sols agricoles, marché des compléments alimentaires, des biomatériaux…

Dans le secteur de l’alimentaire, les ingrédients fonctionnels algosourcés ne sont pas une nouveauté : agar-agar, alginate, carraghénanes, colorants… Mais, de plus en plus, les algues s’invitent dans notre assiette comme matière première alimentaire : paillettes à saupoudrer, tartinables, voire même comme légume en cœur d’assiette ! « La porte d’entrée de la consommation d’algues, c’est la gastronomie asiatique, explique Hélène Marfaing, du Ceva. C’est toujours difficile d’intégrer un nouvel ingrédient dans notre alimentation. Mais on a des algues différentes en Europe – et particulièrement en Bretagne – et en Asie, on peut créer nos produits. » Un appel entendu par nombre d’industriels et start-up, qui se donnent pour beaucoup l’ambition d’intégrer l’algue dans la gastronomie européenne et française.

Pour Thimothée Serraz, directeur d’Algolesko, il n’y a pas de mystère pour développer ce marché : « Il faut démocratiser les algues, travailler l’innovation produit et développer l’algoculture. »

 

Vincent SCHUMENG

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