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Le marché du saumon fumé en France connaît « un extraordinaire dynamisme », se réjouit Jacques Trottier, président du groupe saumon et truite fumés à l’Entreprises du traiteur frais (ETF). La hausse des ventes pour la consommation à domicile, + 10,7 % de janvier à octobre 2020 (versus 2019), a débuté avant la crise sanitaire et s’est accentuée au confinement de printemps : + 14,4 % du 16 mars au 10 mai. La truite fumée à + 1 % (janvier-octobre) ne profite pas de la dynamique, limitée par la capacité des piscicultures. Pourquoi cet attrait pour le saumon fumé ? Déjà, son excellente image : pour plus de 9 Français sur 10, il est pratique, savoureux, riche en oméga-3 et protéines (enquête ETF/CSA, octobre 2019). Et son prix est stable. « Les atouts du saumon ont été renforcés par la crise sanitaire : richesse nutritionnelle, emballage rassurant, repas apprécié de toute la famille, volonté de se faire plaisir face aux restrictions », énumère Jacques Trottier. Même si la hausse des achats pour le domicile a démarré avant mars, elle a ensuite bénéficié d’un transfert à la fermeture des restaurants. Et le drive fait la plus belle performance avec + 63 % en valeur depuis début 2020, et un pic au printemps. Ce succès est-il aussi lié au logo collectif Fumé en France ? Créé en 2019 après la charte lancée en 2018, il implique de réaliser toute la préparation en France, avec une gestion complète de la responsabilité sociétale de l’activité, notamment des achats durables. « C’est compliqué d’isoler l’effet du logo, mais il trouve tout son sens avec l’actuel besoin de réassurance, de traçabilité et de relocalisation. » C’est une garantie de qualité pour 73 % des Français. D’autant que dans cette gamme de prix – de 35 à 40 euros/kg –, on se renseigne. « On en attend surtout une image positive dans la durée. » Les deux tiers du saumon fumé vendu en France sortent des ateliers de fumage français. Une trentaine de PME fument au moins 5 tonnes de saumon par an, dont 7 au-delà de 1 000 tonnes. Les dix principaux signataires de la charte pèsent environ 85 % des volumes préparés en France : Delpeyrat, Delpierre, Fjord King, Guyader Gastronomie, Labeyrie, Le Borvo, Les jardins de l’océan, Mer Alliance Armoric (Thai Union), Moulin de la marche et Saumextra. « La certification n’est pas facile à obtenir, six l’ont eue et c’est en cours pour quatre entreprises », prévient Vincent Gélamur, président de la Confédération des industries de traitement des produits des pêches maritimes (CITPPM). Certipaq effectue le suivi, « avec au moins deux contrôles par an et 70 points vérifiés », précise Adrien Trucas, directeur du développement à l’organisme de certification. « Tant mieux pour notre crédibilité si la barre est haute et challenge les entreprises », souligne Jacques Trottier. En plein reconfinement, en novembre, le secteur se préparait à des commandes de fin d’année plus imprévisibles que jamais. En général, un tiers de la consommation annuelle a lieu du 10 novembre au 5 janvier. Le saumon fumé est le produit de la mer incontournable des fêtes pour 72 % des Français, devant les huîtres et les crustacés à 65 et 55 %. L’offre s’est encore enrichie en formats et origines. Mais quel volume prévoir ? « Tous les opérateurs se le demandent, répond Jacques Trottier. Aura-t-on un réveillon à minima ou de réconfort ? » Les inconnues se cumulent : restauration ouverte ou non, date et conditions du déconfinement… En tout cas, le calendrier, avec des réveillons le jeudi soir, augure des repas festifs sur les week-ends. Et vu le défoulement sur les produits apéritifs au premier déconfinement, « avec un filtre rose, on peut se dire qu’un déconfinement en décembre verrait un flux de consommation ». Les distributeurs complèteront les volumes réservés cet automne avec du réassort si les achats dépassent les prévisions. « La filière fera son possible pour y répondre. Et si on doit subir un énorme rush et se retrouver à court, ce sera un moindre mal. » Solène LE ROUX |