Première espèce de la pêche française, la coquille bat cette année tous les records.
Le marché français de 72 000 tonnes (140 000 t en équivalent poids entier) est d’abord approvisionné par la production, estimée à 27 000 tonnes en 2020 (avec 19 000 t vendues sous criées). Les imports sont en baisse depuis vingt ans et atteignent 12 000 tonnes en 2020. La France étant le premier marché européen, les exports sont modestes, de l’ordre de 6 000 tonnes en 2020. En volume, les pays clients sont l’Espagne, l’Italie et le Royaume-Uni. En valeur, l’ordre s’inverse et le Royaume-Uni est en tête, puis suivent l’Italie et la Belgique.
Les pays fournisseurs de la France sont en volume l’Argentine, le Pérou, et le Royaume-Uni, et en valeur le Royaume-Uni, le Canada et l’Argentine. Notons toutefois que la coquille pêchée en Manche, la Pecten maximus, n’est pas la même espèce que celle pêchée dans les eaux du continent américain, le pétoncle. Sur les 19 000 tonnes débarquées en criées, 11 500 viennent de la baie de Seine, et près de 6 000 de la baie de Saint-Brieuc. Si on ajoute les ventes hors criée (environ la moitié des ventes en Normandie), la production totale de coquilles atteint 27 000 tonnes.
La production est en hausse constante depuis vingt ans grâce à des mesures drastiques de gestion des stocks, détaillées par Dimitri Rogoff, président de Normandie Fraîcheur Mer et du CRPMEM de Normandie : « On a mis en place des horaires et des jours de pêche, des quotas, un étalement de la campagne, et une meilleure sélectivité des dragues avec des anneaux plus grands. Mais la mesure phare est une zone de jachère qui laisse chaque année en repos biologique une partie du gisement. » La bonne gestion permet une hausse spectaculaire de la biomasse exploitable : 65 000 tonnes en baie de Seine et 44 000 en baie de Saint- Brieuc.
La production en hausse a très vite donné à la filière un défi de taille : garder une production qualitative et valorisée malgré la hausse des volumes. Selon Arnaud Manner, directeur de Normandie Fraîcheur Mer, le pari est réussi : « Dès le début, nous avons communiqué sur la qualité de la coquille Pecten maximus et l’origine française. Le Label rouge, quiconcerne 10 % des volumes en criée, a permis de tirer la qualité vers le haut, et de nous faire connaître par la GMS et les consommateurs. Le produit est devenu plus connu, les mareyeurs ont acquis un vrai savoir-faire de décorticage, ce qui a permis de faire monter la demande en même temps que l’offre. Les prix sont ainsi restés relativement stables, l’offre s’est adaptée à la GMS, et la coquille s’est démocratisée. Résultats : nous écoulons sans difficultés majeures notre production toujours en hausse, et les importations baissent. »
Le plébiscite de la coquille par les consommateurs a été confirmé lors de la crise sanitaire, où la consommation de noix a augmenté malgré la fermeture des restaurants. Le marché du frais domine avant les fêtes de fin d’année. La seconde partie de la saison profite davantage à la transformation, en particulier au secteur du surgelé. Pour Xavier Menguy, directeur du pôle pêche du groupe Le Graët dont fait partie Celtarmor, « toutes les coquilles trouvent un débouché. Aujourd’hui, notre site sur le port de Saint-Quay-Portrieux est un moteur de valorisation pour les pêcheurs. La part de la production de noix surgelées en Label rouge est croissante, et à partir de décembre, nous lançons le Label rouge sur les noix fraîches ».
Pour ses produits surgelés, Celtarmor commercialise en GMS sous marques distributeurs, qui mettent en avant les terroirs et la qualité premium. D’après Damien Venzat, président de Cobrenord, « cette année encore, la demande en baie de Saint-Brieuc est portée par la vente directe aux consommateurs et à la transformation, davantage qu’à la RHF malgré l’ouverture des restaurants et la fin de la crise Covid. » Une tendance de fond permise par la démocratisation du produit et accélérée par le contexte sanitaire.
Vincent Schumeng