« Des milliards d’euros flottent sur la mer », a souligné le représentant d’Interpol lors de la conférence organisée mi-octobre à Paris par l’OCDE, la FAO et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). Cette première rencontre, destinée à renforcer la coopération internationale pour lutter contre la pêche illégale et la criminalité associée, a réuni des participants du monde entier.
Menace directe sur la ressource, la pêche illégale coûterait à elle seule jusqu’à 21 milliards d’euros (1), sans compter le manque à gagner pour les activités de pêche et de transformation licites et la perte de recettes fiscales.
L’estimation ne tient pas compte du coût des activités criminelles, ni des souffrances imputables à la traite d’êtres humains sur les bateaux pirates ou dans des usines de transformation. « La pêche illégale est souvent liée au crime organisé, qu’il s’agisse de trafic humain ou de drogue. Des liens apparaissent maintenant dans le financement du terrorisme », souligne Antonia Leroy, analyste politique à l’OCDE.
Arrêter les bateaux ne suffit pas, car il y a derrière de puissants réseaux de cols blancs. « Les contrôles en mer sont très chers et il peut être plus efficace de tracer les mouvements financiers pour traquer le mal à la source. » En ce sens, la coopération internationale des services fiscaux, de pêche et de police est déterminante. Les délits fiscaux étant souvent mis en évidence par les pays liés à la pêche : évasion fiscale, fraudes à l’impôt, aux droits de douane ou à la sécurité sociale. Bon nombre de navires incriminés sont aussi sous pavillon de complaisance dans des paradis fiscaux.Dans la traque du Thunder, trop célèbre chalutier pirate, Interpol a coordonné l’action avec plus de 30 pays. Preuve que la lutte contre la « criminalité halieutique » passe par un renforcement des échanges d’informations entre les services d’État, y compris dans un même pays. « En Norvège, la collaboration entre directions des pêches et services fiscaux a donné de bons résultats. »
D’autres expériences, présentées lors de la conférence de Paris, ont montré comment les pratiques frauduleuses ont pu être combattues, en particulier en Corée, en Espagne et en Indonésie. Éric Hylton, patron du groupe d’action sur les délits à caractère fiscal et autres délits de l’OCDE de conclure : « Il est vital que les pays et les différentes agences collectent et partagent les données financières liées à la criminalité dans les pêcheries. »
B. V.
(1) estimation datant de 2009