Cela ne peut pas être une coïncidence. Alors qu’Orthongel, organisation française des producteurs de thon congelé et surgelé, se prononce en faveur d’une limitation de l’usage des DCP ou dispositifs de concentration du poisson à l’occasion de la première conférence africaine du thon à Abidjan ce 25 septembre 2014, Greenpeace choisit la même date pour sortir son premier classement français des marques de thon.
Ce classement réalisé sur la base de trois critères - technique de pêche, espèce, et engagements écrits concernant les approvisionnements – vise à mettre la pression, via les consommateurs, sur les conserveurs et les distributeurs pour qu’ils modifient leur sourcing… en influant alors sur les modes de captures du thon tropical.
Greenpeace plébiscite les captures des ligneurs ou canneurs et considère l’usage des DCP, dispositifs de concentration du poisson, comme une technique de destruction massive du poisson. L’ONG cependant ne se prononce pas, sur les senneurs qui pratiqueraient la pêche en bancs libres. Une technique de pêche, dans laquelle les pêcheurs français sont plutôt doués.
En Angleterre comme aux USA, la mention « FAD free », soit « capturé sans DCP », est apparue sur les « boîtes de conserve » pour tenter d’échapper aux mauvaises notes de l’ONG alors même que les quantités de thon capturé à la ligne sont largement insuffisantes pour satisfaire la demande des conserveurs dans le monde, ce toutes espèces de thon confondues. Réunie aux Seychelles, voilà deux ans, la filière thon, déjà mise sous la pression de Greenpeace, espérait que les discours des scientifiques seraient entendus. Tous s’accordaient à dire que la pratique d’une unique technique de pêche pourrait conduire à des déséquilibres sur la ressource : car si la pratique du senneur avec DCP peut favoriser la prise de juvéniles, la pratique de la ligne peut, de son côté, favoriser la prise d’individus plus gros, plus matures et en capacité de se reproduire. Or l’avenir de la ressource passe par un équilibre entre des thons adultes et des juvéniles.
Malheureusement, il semble que Greenpeace, pourtant présent, n’ait écouté que d’une oreille distraite. Dans son classement français, c’est là encore un approvisionnement de thon capturé à la ligne qui est bien noté, celui de Phare d’Eckmühl et de Système U, tandis que la technique de pêche du thon saupiquet – pourtant adhérent d’Orthongel et s’auto-restreignant sur l’usage des DCP – est classée rouge.
Côtés espèces, Greenpeace note sévèrement l’usage d’albacore, le thon préféré des Français et lui préfère le listao, dont les stocks sont jugés en bon état. Le listao, un thon plus petit et se reproduisant plus vite que l’albacore ou le thon rouge, est par contre beaucoup utilisé dans le monde par les conserveurs.
Pas une marque n’a un feu vert en ce qui concerne ses engagements écrits pour un approvisionnement durable. À noter que le classement fait tomber tout en bas, les acteurs qui n’ont pas voulu se soumettre à leur questionnaire.
Céline ASTRUC
PS : Sachant qu’il est très facile de consulter le classement, nous laisserons à chacun le soin d’aller le chercher et décidons de ne pas le publier tel quel.
Pour en savoir plus, retrouvez notre article : THON EN BOITE : MIEUX PÊCHÉ, MIEUX VENDU ?
