Sur les 529 navires de pêche que compte la Nouvelle-Aquitaine, les trois quarts sont des moins de 12 mètres. Une flottille de côtiers, adepte des sorties à la journée, dont les apports sont recherchés. Inscrit dans la pure tradition du mareyage avec peu de produits transformés et spécialiste de l’export, Foro Marée à La Rochelle trouve auprès de ces bateaux les pièces entières de toute première fraîcheur qu’il envoie aux quatre coins du monde.
L’entreprise, qui achète quelque 6 000 tonnes par an dans les criées françaises, ne cache pas développer aussi les achats de gré à gré avec cette flottille ou encore signer des contrats avec certains de ces bateaux. Cet engagement contractuel va de pair avec la mise en place d’un cahier des charges. « On attend une prestation. Comme on a la chance d’être avec des vaillants qui respectent leur métier et font le boulot sur le bateau, on peut proposer un produit qualitativement mieux travaillé », explique Jean-Manuel Goncalves. Le directeur de Foro Marée et de Mayo marée à Arcachon indique valoriser ces produits à l’achat. L’entreprise a également mis en place les moyens logistiques pour les acheminer le plus rapidement possible. Pour des espèces phares comme la sole, le merlu, le maigre, le céteau ou bien encore la seiche, Tom Alldritt, responsable des achats chez Mericq, basé à Estillac, près d’Agen, parle de son côté d’une « expertise globale » qui s’est forgée dans les ports de la région. « On ne peut pas parler de spécialisation car les criées vivent de leur diversité mais on peut dire qu’il y a des savoirfaire qui se sont développés sur ces espèces symboliques », explique-t-il. Des chaînes de compétences, du pêcheur au mareyeur, où tous les maillons comptent.
La fermeture de l’atelier de mareyage de l’Organisation de producteurs (OP) Pêcheurs d’Aquitaine à Arcachon semble avoir valeur d’exemple sur ce point. Le port doit aujourd’hui composer avec une partie de sa flottille ayant décidé d’aller vendre ses céphalopodes à la criée de Pasajès, en Espagne. Le céteau, qui était dans les cinq premières espèces en valeur à Arcachon jusqu’au milieu de la dernière décennie, vient, lui, de finir l’année 2020 en 14e position. Deux espèces pour lesquelles l’atelier de mareyage de l’OP, désormais repris, avait développé un savoir-faire et de bons réseaux de commercialisation par-delà justement les Pyrénées. Il n’en demeure pas moins, selon Sophie Méric, que le marché régional reste attrayant pour sa flottille de pêche. « La Nouvelle-Aquitaine est en demande de produits locaux. Nos clients poissonniers sont enclins à acheter une origine en lien avec leur lieu d’implantation. Dans le Sud-Ouest, le marché est bon », assure la directrice de Sobomar Atlantique, implanté à Saint- Loubès, près de Bordeaux. Dans un contexte de crise sanitaire et de fermeture des restaurants, « on s’en tire pas mal par rapport au national », consent David Milly. Le directeur de l’OP Pêcheurs d’Aquitaine dresse néanmoins le constat d’un marché difficile. « Les cours sont très variables avec des différentiels importants d’un jour à l’autre. On rachète plus que d’habitude notamment pour la lotte et le bar », explique-t-il.
La comparaison entre les premiers trimestres 2021 et 2020 montrerait aussi des baisses de l’ordre de 20 % du prix moyen sur de nombreuses espèces dans les criées de la région. Pandémie ou pas, « on est obligé de suivre le prix du marché. Il n’y a pas forcément de valorisation additionnelle par rapport à la provenance des produits », explique Tom Alldritt. De quoi donner des idées à Jean-Manuel Goncalves : « Il y aurait peut-être une piste à explorer pour une démarche régionale qui mettrait en avant le meilleur de la pêche néoaquitaine. » D’autant que pour le gérant de Foro Marée, le marché à l’export s’ouvre à une gamme d’espèces régionales jusqu’ici méconnues comme l’ombrine, le bar moucheté ou encore la lamproie. La force, selon lui, des émissions culinaires. En matière gastronomique, « elles ont rendu tout le monde au courant de tout », indique-t-il.
Reportage : Loïc FABRÈGUES
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