La 8e édition de la Semaine de la pêche et de l’aquaculture responsables s’est tenue du 12 au 18 février. À l’occasion, le MSC* a organisé à Paris une table ronde sur le potentiel d’une pêche durable pour l’alimentation de demain.
PDM – Quel est l’objectif de la SPAR ?
Amélie Navarre – Nous nous adressons aux consommateurs et au grand public pour leur expliquer les enjeux de la pêche durable. Notre message, c’est que tout le monde a son rôle à jouer, pêcheurs, professionnels de la filière, consommateurs et citoyens. Nous communiquons sur les réseaux sociaux, mais nous avons aussi une campagne média sur France 2 et France 5, ainsi qu’un affichage dans le métro parisien.
PDM – Qui sont vos partenaires pour cette campagne ?
A. N. – Nous travaillons avec 58 entreprises de l’amont à l’aval. Nous les accompagnons dans leur communication auprès des consommateurs, mais aussi en BtoB . C’est une démarche volontaire de leur part. En parallèle, nous sensibilisons également leurs collaborateurs en interne sur ces enjeux.
PDM – Pourquoi organiser cette conférence durant cette semaine ?
A. N. – Nous sommes ravis de pouvoir le faire, maintenant que la crise sanitaire est passée ! L’idée est d’élargir le champ est de ne pas parler que de pêche, mais aussi de pollution, du climat, de la connaissance scientifique… Alors que plus de 3 milliards de personnes dépendent des produits de la mer pour 20 % de leurs apports en protéines, il y aura une vraie question de sécurité alimentaire à l’avenir. De plus, selon la FAO, si toutes les pêcheries s’engageaient dans la durabilité, nous pourrions produire 16 millions de tonnes supplémentaires. Cette table ronde offre de riches pistes de réflexion mettant en avant les enjeux majeurs et les défis pour atteindre cette sécurité alimentaire mondiale.
Table ronde – Pourquoi les aliments de demain seront-ils bleus ?
Pour atteindre cette pêche durable à l’échelle européenne (la Politique commune des pêches avait fixé l’objectif de 100 % des stocks pêchés durablement en 2020), l’eurodéputée Renew Catherine Chabaud prône « des politiques publiques maritimes intégrées par l’approche écosystémique », c’est-à-dire l’inclusion de l’impact sur l’environnement de l’ensemble des activités maritimes. Autre sujet selon elle, « les pêcheurs ne sont pas suffisamment organisés et représentés à Bruxelles. Le législateur européen a besoin de ce dialogue avec la profession ! » Ce à quoi Laurent Debas, cofondateur de l’association Planète Mer, rajoute que « les pêcheurs ne votent pas assez aux élections professionnelles ». Cet océanographe de profession travaille avec les pêcheurs méditerranéens des prud’homies et a identifié comme principal enjeu pour eux la lutte contre le braconnage et la pêche illégale, pointant par exemple l’impact de la pêche de loisir « équivalent à la pêche professionnelle ». Au-delà de son travail avec les pêcheurs de Méditerranée, le scientifique rappelle que « le milieu marin a une capacité de résilience exceptionnelle. L’objectif est donc de réduire la pression qu’il subit pour nourrir demain ». Pour Élisabeth Vallet, directrice d’Ethic Ocean, « c’est le rôle de la filière aval de s’engager pour fournir des produits durables, l’information est trop complexe pour le s consommateurs. Nous leur proposons un accompagnement pour les aider à s’approvisionner durablement ».
Mais si pour certains les enjeux de durabilité se heurtent aux réalités économiques, Catherine Chabaud en appelle à « une consommation de produits issus de la pêche locale, en payant le juste prix aux pêcheurs, qui subissent les premiers les effets d’un océan en mauvais état. Ils font face à l’injonction contradictoire entre produire pour nourrir et préserver la nature en ayant moins d’impact ». Un discours qui fait écho à la crise agricole que traverse l’Europe.
Vincent SCHUMENG
*Marine Stewardship Council