Quasiment multiplié par deux en deux ans ! Le cours du saumon frais n’en finit plus de donner des sueurs froides aux fumeurs français, pour qui cette matière première représente 50 à 70 % des coûts de production. Le prix du saumon norvégien, à l’origine de 53 % du saumon fumé dans l’Hexagone, a progressé de 96,65 % entre le 1er trimestre 2021 et le 1er trimestre 2023. Au mois de mars 2023, le cours du saumon norvégien 4/5 kg a atteint le cours inédit de 127 couronnes norvégiennes (soit 11 euros) le kilo, selon l’indice de référence, le Nasdaq Salmon Index (nasdaqomxtrader.com).
« Aucune évolution structurelle ne permet d’envisager une rémission significative sur des niveaux de prix très élevés du saumon, alors que les entreprises sont également confrontées à la hausse généralisée de leurs charges (énergie, emballage, transport, main-d’œuvre », s’alarme ETF (Les Entreprises du Traiteur Frais), syndicat membre de l’Adepale, dans un communiqué du 17 avril.
Plusieurs facteurs expliquent cette hausse vertigineuse du prix du saumon. Le premier est structurel, avec un fort déséquilibre mondial entre offre et demande. Depuis la crise du Covid, la demande a notamment explosé en Chine, où les exportations de saumon frais depuis la Norvège ont progressé de 25 %. L’autre explication est à chercher du côté de la production. La biomasse a fortement baissé du fait de la chaleur de l’été 2022 (– 75 % de production en Écosse sur les trois derniers mois), l’Amérique latine connaît pour sa part des difficultés sanitaires. La hausse des prix du transport n’arrange rien et explique en partie la flambée des cours du saumon (sauvage) d’Alaska.
La situation ne devrait pas s’arranger dans les mois à venir. La Norvège, premier pays producteur mondial, a en effet baissé ses mises en production. La mise en place d’une nouvelle taxe par le gouvernement norvégien (voir notre article Taxe norvégienne sur le saumon : quel impact ?) a par ailleurs entraîné un blocage du mécanisme de contractualisation à la bourse d’Oslo (outil Fishpool), renvoyant la majorité des achats vers le marché spot.
« La filière appelle tous les acteurs à faire preuve de compréhension et de solidarité, comme en 2022. Chacun doit faire preuve de responsabilité dans un moment de très forte pression […]. La situation est d’autant plus urgente que les projections des cours sur les prochains mois restent 30 à 50 % supérieures à l’année dernière », insiste ETF.
En France, les ateliers de fumaison (saumon et truite) représentent 2 600 emplois directs, dans 30 PME (petites et moyennes entreprises) et ETI (entreprises de taille intermédiaire). Leur chiffre d’affaires s’est élevé à 705 millions d’euros en 2021 : 551 millions pour le saumon fumé et 154 millions pour la truite fumée. 97 % du CA est réalisé dans l’Hexagone.
Fanny ROUSSELIN-ROUSVOAL