[nbsp]Elle est revenue dans la nuit de la criée du Guilvinec, à 100 km de sa base lorientaise. Un des hauturiers de l’OP Cobrenord y débarquait sa pêche et Isabelle Letellier devait faire le point sur l’avancée du travail sur la qualité à bord de ce chalutier de l’armement nord breton. Sans transition, elle reprend ce matin la rédaction du dossier sur l’harmonisation du tri sous les halles à marée bretonnes : il doit être présenté sous peu à son commanditaire, la région Bretagne, suite à un appel d’offres remporté avec le cabinet nantais Via Aqua.
Isabelle Letellier et Hervé Le Créour, co-dirigeants, ont fondé le bureau d’études Mer Conseils en avril 2015. Une entreprise junior certes, mais créée par deux experts seniors, qui travaillent ensemble depuis plus de vingt ans dans la filière bretonne. Isabelle, biologiste de formation, a longtemps dirigé Normapêche, où elle avait été recrutée en 1994, moins d’un an après la naissance de cette association interprofessionnelle porteuse de la marque Bretagne Qualité Mer (BQM). Hervé, fils de pêcheur de Larmor, en était le directeur technique. Lorsque cette structure a été absorbée, fin 2014, par l’association Breizh Filière Mer, porteuse de dossiers label Rouge et aujourd’hui de la marque BQM, il n’était plus possible de maintenir des salariés, faute de financement. Pas question de se morfondre pour les deux Lorientais hyperactifs, bien décidés à rebondir, ensemble, dans une nouvelle aventure, privée cette fois.
« Finalement, vous faisiez du bon boulot à Normapêche ! »,lui a avoué récemment un important mareyeur. Il était de ceux qui ont regardé longtemps de travers ce qui était à leurs yeux une émanation directe du mouvement coopératif : en ces décennies 90-2000 de rivalités aiguës entre OP bretonnes, dans un contexte politique régional changeant, Isabelle et les autres salariés de Normapêche ont dû batailler ferme pour s’affirmer. Elle ne veut plus s’attarder sur ce passé, qui lui a toutefois forgé une reconnaissance de bosseuse, compétente, auprès des pêcheurs et mareyeurs. Et une réputation non usurpée de « penn kalet » : une tête dure, et solide ! Ce capital terrain indéniable des deux associés est aussi repéré par les institutionnels et politiques, qui font de plus en plus confiance à Mer Conseils. La Scop, qui assure aussi des formations in situ, a pu remporter des appels d’offres et consultations, dans une subtile stratégie d’alliance avec d’autres cabinets, compétiteurs par ailleurs.
Texte et photo : Lionel FLAGEUL