Les labels sont vus par la filière comme des outils de valorisation des bonnes pratiques en amont (pêche et aquaculture), mais aussi comme des leviers marketing pour séduire les consommateurs, en France comme à l’export. Peuvent-ils aider à relancer la consommation ?
Difficile de faire la différence entre tous les termes, acronymes et logos colorés lorsque nous parlons de labels, parfois abusivement. Rappelons qu’un label, ce n’est que le logo affiché sur un produit qui doit respecter un certain cahier des charges. Citons quelques écolabels, dont les allégations portent sur la durabilité, comme le bio (Agriculture Biologique) : MSC (Marine Stewardship Council), ASC (Aquaculture Stewardship Council) ou plus récemment Pêche Durable. Bien connu du consommateur, le Label Rouge garantit pour sa part une qualité supérieure. La STG (spécialité traditionnelle garantie) fait quant à elle référence à une méthode de production traditionnelle : les moules de bouchot sont concernées depuis 2013. Il existe également des allégations régionales telles que les indications géographiques protégées (IGP), les appellations d’origine protégées (AOP) ou la marque Breizhmer. Enfin, les enseignes de la grande distribution développent également leurs propres filières : « Reflets de France » chez Carrefour ou « Nos régions ont du talent » chez Leclerc. Il faut distinguer les labels publics (Label Rouge, AB, STG, IGP et AOP sont gérés par l’Inao, l’Institut national de l’origine et de la qualité, et Pêche Durable par France AgriMer) des labels privés.
Avant d’être des leviers marketing, les labels sont avant tout des outils de valorisation des bonnes pratiques en amont et reconnaissent un savoir-faire. Geoffroy Dhellemmes, directeur de l’armement hauturier France Pélagique, cite ces deux arguments pour expliquer la labellisation MSC, et récemment Pêche Durable, de son hareng : « Je veux montrer que nous pouvons faire de la pêche industrielle durable. » En aval, MerAlliance, leader du saumon fumé MDD, défend également sa démarche RSE. « Nous sommes certifiés ASC, précise Astrid Marty-Roussel, responsable marketing. Et nous affichons notre ancrage français à Quimper. » Les enseignes de la GMS sont motrices et poussent à la labellisation des produits de la mer. Parmi elles, nous pouvons citer Carrefour qui se donne pour objectif d’avoir une gamme au maximum certifiée MSC, Auchan qui mobilise complètement le label Mr. Goodfish, Cora dont quasiment 100 % de l’étal est certifié Pavillon France ou encore Grand Frais dont tous les produits de la mer bénéficient d’une allégation environnementale.
Mais les enseignes constatent également des dynamiques très contrastées. Jonathan Rotgé, acheteur marée chez Cora, note que « le bio s’effondre, alors que le Label Rouge et Pavillon France se maintiennent ».
La situation du label MSC est ambiguë. Leader international incontesté des écolabels, il peine à se faire une place dans l’imaginaire du consommateur. Certains professionnels critiquent son manque de lisibilité, le fait qu’il n’intègre pas de dimension sociale dans son cahier des charges et certaines ONG ne manquent pas de pointer du doigt le fait que des techniques de pêches à fort impact environnemental peuvent en bénéficier. « Le référentiel MSC n’exclut aucune technique de pêche, explique Amélie Navarre, directrice du bureau français du MSC. Toutes les pêcheries ont un impact, y compris les arts dormants. » Au-delà de la GMS, ce petit logo bleu est un incontournable pour l’export. L’exemple du marché suisse est on ne peut plus parlant. « En Suisse, le bio et les labels MSC et ASC ont le vent en poupe, développe Paul-Francis Amiot, chargé d’affaires agroalimentaires au sein du bureau helvétique de Business France. Pour la GMS suisse, le besoin est sur les produits labellisés MSC, ASC, bio et GlobalG.A.P., c’est dans le cahier des charges des importateurs. Sans cela, ils ne regardent même pas l’offre produit. »
Finalement, les plus gros demandeurs de labels ne sont pas nécessairement les consommateurs, qui peuvent avoir du mal à s’y retrouver entre tous les logos et allégations. Dans sa dernière étude consommation, Globescan revient sur les éléments d’arbitrage des consommateurs. Le principal levier pour (re)lancer la consommation de produits de la mer, c’est le prix, cité par 53 % des répondants. Viennent ensuite la durabilité (27 %), la disponibilité en magasin (23 %) et les aspects santé (22 %). Dans l’acte d’achat, les bénéfices de santé et nutritionnels sont davantage appréciés (et sans doute compris) que les aspects environnementaux. Les labels sont ainsi des outils de traçabilité pour la filière, des garanties pour le consommateur et des structures pour les producteurs afin de communiquer et d’améliorer leurs pratiques.
Vincent SCHUMENG