Les moules sous-taille enfin valorisées

Le 21/04/2022 à 9:54 par La rédaction

Les mini-moules font leurs premiers pas sur les marchés en jouant la carte d'une protéine qualitative et d'un produit français et écologique, en valorisant ce qui était jusqu'à présent un déchet bien encombrant.

L'annonce a fait l'effet d'un coup de massue dans la profession mytilicole. Un arrêté préfectoral interdit depuis la mi-décembre d'épandre les moules sous-taille dans la baie du mont Saint-Michel. En cause, les mauvaises odeurs et la formation de vase aux endroits où ces moules sont déposées. Trois projets sont en train de voir le jour pour valoriser ces moules inférieures à la taille commercialisable mais il faudra attendre 2025, soit trois saisons, pour qu'ils soient tous opérationnels.

Le projet de valorisation de Mussella est le plus avancé avec une phase de commercialisation lancée l’été dernier. Implanté dans le Morbihan à Pénestin, Axel Brière a mis en place un procédé qui permet de séparer la chair de la coquille et d’en extraite trois éléments : la chair, la coquille et le jus issu de la cuisson des moules. Chacun de ces éléments est valorisé dans le secteur agroalimentaire sur des marchés déjà existants. La chair, surgelée IQF, peut être vendue brute ou intégrée dans des recettes comme les tartinables ou les tapas. « Le but est de profiter d’un produit qui n’existe pas ailleurs, vu qu’il n’est pas commercialisé jusqu’à présent, et qui s’inscrit dans une dimension écologique avec une usine éco-conçue et la valorisation d’un coproduit avec une appellation bouchot origine France. Nous pensons que le consommateur sera au rendez-vous », explique Bruno Deshayes, directeur commercial France de Cornic Novamer.

En phase de prospection, les moules de Mussella sont d’ores et déjà référencées chez Eco-miam, distributeur de produits surgelés. Les jus de cuisson, quant à eux, sont utilisés comme base de sauces. « C’est de plus en plus demandé pour faire les sauces et éviter les arômes artificiels. On a presque plus de demandes sur les jus que sur la chair », s’amuse Axel Brière, dirigeant de Mussella.

Pour cette première saison sur l’été 2021, vingt tonnes de chair ont été produites, ce qui représente 200 tonnes de moules traitées. « C’était notre objectif, se satisfait Axel Brière. Vu nos performances, on va viser un doublement de la cadence pour atteindre les 400 kg/h de produit fini et réaliser 400 tonnes pour l’été 2022. » Chez Mytilimer, les recherches sur la valorisation des moules sous-taille ont commencé en 2015 et s’orientent vers un projet d’hydrolysat de chair, un jus protéiné qui peut être utilisé dans le petfood mais aussi en tant qu’arôme alimentaire. Les coquilles propres, quant à elles, peuvent être intégrées dans la nutrition animale en tant qu’apport calcaire pour les poules et les porcs, par exemple.

Pour y parvenir, l’entreprise a breveté en 2018 sa technique d’hydrolyse enzymatique. Antoine Prévost, directeur marketing de Mytilimer, l’assure : « Il y a des vrais débouchés car nous sommes sur une protéine ultra-qualitative avec une traçabilité complète. »

Mytilimer a investi 5  millions d'euros depuis quatre ans sur ce projet de valorisation qui n'est pas encore opérationnel. Son site de production s'intègre à un bâtiment bien plus vaste qui regroupera l'ensemble des activités de l'entreprise en  2023 à Cancale, près de la baie du mont Saint-Michel. Le démarrage du traitement des moules sous-taille est prévu pour  2024 avec un objectif de 1  500  tonnes pour la première saison. Mais déjà, l'entreprise voit plus loin  : « La production d’hydrolysat peut être appliquée à d’autres produits, cela permettrait de faire tourner l’installation sur toute l’année et pas uniquement pendant la saison mytilicole. C’est techniquement possible », détaille Antoine Prévost. Reste à poursuivre les tests pour identifier ces espèces et les intégrer dans le process dès l’ouverture du site.

Cultimer, de son côté, adopte une approche décentralisée avec un projet de valorisation de ces moules directement chez le producteur grâce à de petites uni-tés de traitement. L'entreprise broie les moules entières, les hygiénise, les fait fermenter trois jours à 55  °C. À la sortie  : un hydrolysat de chair qui sera utilisé comme intrant pour les méthaniseurs voisins. Les coquilles, quant à elles, pourront être valorisées comme amendement agricole ou intégrées dans l'alimentation animale. Les modules destinés aux mytiliculteurs devraient être opérationnels pour la saison 2025.

« On développe un outil pour que les mytiliculteurs puissent traiter leurs moules sur place. Nous voulons nous intégrer dans le circuit local », explique Jean- Marie Grosmaître, directeur des sites de Cultimer.

20 t
de chair de moules
produites pour la
1re saison de Mussella

1 500 t de moules sous-taille

que souhaite traiter Mytilimer, à l'été 2022

 

Julie LALLOUËT-GEFFROY

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