« Singapour veut diversifier ses achats  »

Le 16/06/2020 à 10:09 par La Rédaction

 

Wilfrid Fousse
Conseiller aux affaires agricoles à l'ambassade de France
à Singapour

Singapour
veut diversifier
ses achats ”

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Avec le Covid-19, Singapour s’est inquiétée pour ses approvisionnements alimentaires et a signé à la hâte des accords avec huit pays. Wilfrid Fousse, conseiller aux affaires agricoles à l’ambassade de France à Singapour depuis un an et demi, a alors alerté les filières françaises, via FranceAgriMer et le syndicat national du commerce extérieur des produits congelés et surgelés (SNCE).

 

 

Plus de 11 milliard d'euros de produits agroalimentaires importés en 2019

 

 

ZOOM sur
Singapour

22 kg
Consommation par an
et par habitant.

(moyenne mondiale 20,3 kg/hab/an selon la FAO)

90 %
Part des produits de la mer consommés issus de l’import.

 
Production
Singapour est une cité-État insulaire de 5,6 millions d’habitants au sud de la Malaisie, à laquelle elle est reliée
par deux ponts.
La pollution de la mer aux alentours par l’industrie limite la pêche.
Une centaine de fermes aquacoles artisanales, en mer et en eau douce, produisent surtout du barramundi et du tilapia.

Importations
Les cinq premiers fournisseurs de Singapour en produits de la mer : la Malaisie, l’Indonésie, la Chine, le Vietnam, et la Norvège. Dans les pays d’Europe, la France arrive 3e derrière la Norvège et l’Espagne. C’est une porte d’entrée intéressante vers les pays de l’association des nations du Sud-est (Asean), voire de l’Asie. Le marché est dynamique
(+ 3 % par an). Les compagnies CMA-CGM et Bolloré Logistics pourraient dédier des avions-cargos aux exportations françaises agricoles et alimentaires vers la cité-État. Le Trésor et BPI France disposent de facilités de financements (prêts garantis).

 

 

 

PDM : Pourquoi cet appel pour approvisionner Singapour ?
Wilfrid Fousse : Singapour est une ville où 90 % de l’alimentation est importée. Quand le Vietnam a cessé d’exporter son riz, et la Russie son blé, la Singapour Food Agency (SFA) a recherché des alliances privilégiées avec des pays fournisseurs traditionnels pour diversifier les approvisionnements et continuer à nourrir la population. Elle ne s’est pas initialement tournée vers la France, mais nous l’avons approchée, ainsi que nos filières alimentaires. Nous avons fait une proposition de déclaration commune. C’est un gros marché pour la France, pour plus d’un milliard d’euros par an de denrées alimentaires, mais il s’agit à 90 % de vins et liqueurs, sur lesquels nous détenons près de 50 % de parts de marché. Sur le reste, nous sommes seulement à 1, voire 1,5 %.

Et sur les produits de la mer ?
W.F. : Singapour en importe autant que de viande, pour environ 750 millions d’euros chaque marché. Ce sont les premiers postes à l’import après l’alcool, les fruits et légumes, les produits laitiers et le tabac. Au détail, on voit peu de poisson : surtout du saumon et du « poisson blanc » sans mention d’espèce. Le marché des produits de la mer est surtout tiré par la restauration, plus qualitative. La France n’est pas trop mal placée, avec 4,2 % de parts de marché, contre 1,7 % il y a dix ans. Cette part croissante, et la demande en hausse, ont conduit à multiplier par cinq nos exportations de produits de la mer vers Singapour en dix ans.

Quels sont les produits concernés ?
W.F. : Nous y vendons de la légine congelée pour 10 millions d’euros, et des huîtres pour 2 millions d’euros, avec chaque fois 30 % de parts de marché. Ensuite, du bar frais et des crevettes (environ un million d’euros chacun). Toutes origines confondues, Singapour achète surtout des crustacés, crevettes en tête, du requin et de la légine congelés, et en poisson frais, saumon, truite et bar. Et des mollusques : seiche, calamar et coquille Saint-Jacques. En croisant ces besoins avec ce que la France exporte souvent, nous voyons des opportunités : truite fraîche, bar congelé, coquille Saint-Jacques, seiches et calamars.

Les exportateurs ont-ils répondu à l'appel ?
W.F. : Sept sociétés se sont déclarées intéressées : des négociants en frais à Rungis et des transformateurs. Avant de les mettre en relation avec des importateurs, il nous paraît plus opportun d’attendre un accord politique global. Car les opérateurs à Singapour suivent les directives gouvernementales, se tournant vers l’Australie, la Nouvelle-Zélande… Dès que nous aurons un retour sur notre proposition, nous lancerons une opération de prospection digitale, préparée par Business France (NDLR : l’entretien a été réalisé le 15 mai).

Y a-t-il des barrières douanières ou sanitaires ?
W.F. : Singapour est un marché très ouvert, sans droits de douane pour l’Union européenne. L’accord de libre-échange signé il y a un an est mis en œuvre depuis novembre. Pour le poisson, il n’y a pas de demande préalable d’agrément sanitaire, juste un contrôle standard des premières livraisons de nouveaux expéditeurs. Avec un point d’attention sur les norovirus dans les huîtres : leur détection interdit l’importation des huîtres, qu’ils soient ou non actifs.

Comment se présente la logistique ?
W.F. : En temps normal, Singapour est très bien desservi, c’est un hub maritime et aérien, avec le 2e plus grand port au monde, et sans doute l’un des cinq premiers aéroports. Comme partout, actuellement c’est un peu plus difficile, avec une baisse des trafics et une hausse des tarifs, mais ce n’est pas appelé à durer.

Propos recueillis par Solène LE ROUX

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