Pas le temps de goûter le soleil printanier sur les quais du Guilvinec… À 17 heures, le second round de la criée des côtiers sonne et Patrice Le Calvez doit acheter la langoustine vivante des premiers chalutiers. Ce 11 mars, 25 caisses (sur un total de 80 emportées) seront aussitôt chargées dans l’utilitaire conduit par son adjointe. Avant 18 heures, les « demoiselles » frétilleront sur l’étal du Leclerc de Pont-l’Abbé.
Le timing est serré mais rodé. Patrice est sur le pont dès 5 h 30. Le responsable marée de l’hypermarché bigouden enchérit alors, par internet, à la criée de Roscoff. Il est aussi au téléphone avec son employé présent à la criée des hauturiers du Guilvinec. Et à 9 heures, les premiers clients déboulent devant l’étal impeccable que Patrice aura contribué à dresser. Un rayon atypique, avec peu de LS, et surtout du poisson entier, préparé à la demande. Les promos sont annoncées dans la presse locale, Facebook et SMS à l’appui. Chef d’un orchestre de 11 permanents (jusqu’à 18 l’été), le quadra débordant d’énergie assure lui-même une part du travail. En 1995, il était seul avec une employée à mi-temps lorsqu’il a repris ce rayon approvisionné par des mareyeurs locaux.
Le natif de Loctudy, alors âgé de 27 ans, avait opéré un retour au pays après une première expérience chez Leclerc : trois ans comme chef de rayon à Landivisiau. Et quelques mois en « exil » dans d’autres enseignes. Les Le Calvez sont marins de père en fils, mais Patrice, formé au lycée maritime et aquacole de Lannilis, ne voulait pas devenir pêcheur.
Le poisson, il va le vendre, après en avoir pêché le meilleur en… criée ! Le magasin de Pont-l’Abbé sera la première grande surface en Bretagne à obtenir son agrément d’achat direct en criée. D’abord à Saint-Guénolé, puis dans les autres criées bigoudènes.
Ce modèle économique est largement gagnant, grâce au savoir faire de Patrice et son équipe. Il correspond parfaitement aux attentes de Patrick Bellec, arrivé – lui aussi en 1995 – comme directeur et devenu propriétaire-adhérent en 2002. Entre Patrice et ce Léonard d’origine rurale, pionnier du développement durable, l’entente continue de porter ses fruits : les deux passionnés des produits de la mer ont explosé les compteurs.
Texte et photo : Lionel FLAGEUL