Jean-Luc Lavole, d’IDmer, |
[ Retour sur le projet ]
L’idée Les freins à lever Les étapes La cible |
« Les coproduits de moules représentent facilement 30 à 40 % de la production à Pénestin, dans le Morbihan. Et parfois 50 % comme sur mes parcs, chiffre Axel Brière, cofondateur de Mussella. Or, 80 % de ces coproduits s’avèrent être des moules sous taille. Ne pas les valoriser, c’est laisser s’échapper de la valeur et risquer un jour de nuire à la belle image de la moule en matière d’impact environnemental. » Depuis que le jeune mytiliculteur s’est installé, la question de la valorisation des moules sous taille, thème de son master d’économie, le taraude. Avec l’aide d’IDmer, il a d’abord travaillé sur une valorisation dans la nutraceutique. « Un échec commercial. Le process retenu ne permettait pas de conserver les molécules les plus prisées », admet Axel Brière. Le producteur se remet en cause et, sentant une montée en puissance de la demande de chair de moules pour l’agroalimentaire, il se penche sur le sujet dès 2015. « Mais pour toucher ce secteur, il est impossible d’être seul. Pour une question de financements comme de volumes. » Il part donc à la conquête d’associés : « Des producteurs motivés par l’idée de gagner un peu sur des déchets. Car si nous ne le faisons pas en tant que producteurs, d’autres le feront. » Quatre mytiliculteurs, dont trois de Pénestin et un producteur de moules bio, le rejoignent au capital de Mussella. « Et nous restons ouverts à l’arrivée d’autres producteurs – mais seulement des producteurs – dans le capital dès lors qu’ils ont des approches de productions responsables, comme avoir des pieux issus de forêts gérées… », indique Axel Brière. Ensemble, les mytiliculteurs disposent de 1 000 tonnes de coproduits de moules à valoriser, contre 100 tonnes lorsqu’il était seul. Mais « seuls 20 % peuvent l’être dans l’agroalimentaire ». Il s’agit des moules T1 et T2, soit les 1 500 et les 2 400 pièces au kilo. Avant de travailler avec IDmer sur la sélection du procédé de transformation, Mussella étudie la « maximisation de la valeur tangible du produit auprès des consommateurs. Pour eux, la qualité de la moule repose sur sa couleur, son goût et sa texture. Ensuite, il y a l’intangible : proposer du bio, une origine bien définie… ». Entre 2015 et 2018, un outil pilote a été mis au point pour purifier le coproduit de manière autonome. « Au total, cela représente 100 000 euros pour le lavage, 300 000 euros pour le décorticage et il faudra compter 2 millions d’euros pour construire l’enceinte qui accueillera la ligne. En travaillant vraiment en ligne, nous gagnerons encore du temps. Et plus la moule est fraîche, mieux elle se décortique par un système vapeur. » Aujourd’hui, le lavage, le debysussage et le calibrage s’effectuent à Pénestin. Les petites moules sont ensuite décortiquées à la vapeur. « Définir le temps idéal a pris du temps. » Un cribleur récupère la chair qui sera stabilisée, moins de 36 heures après la sortie de l’eau, en IQF après un glazurage de 3 % – « bien sûr compensé » – avant d’être conditionnée en barquettes ou sous skin. « La question se pose encore », indique Axel Brière. La mise sous skin réalisée pour le Seafood Expo Global de Bruxelles, faute d’avoir d’autres barquettes disponibles, a beaucoup séduit les visiteurs du salon. « La congélation était obligatoire pour la proposer toute l’année. La saison débute en juillet et s’achève en octobre ». Cela dit, l’idée est de la proposer en décongelé au rayon frais, comme un ingrédient culinaire, pour réaliser des tapas, des soupes, etc. Deux supermarchés Leclerc se sont déjà montrés intéressés. Le prix cible s’élève à 3 euros les 100 grammes. Le lancement est pour juin 2018 mais, déjà en test, la production, en 2017 s’est élevée à 5,5 tonnes. Pour 2018, Mussella espère produire 20 tonnes. Céline ASTRUC |