Poissonnerie Poissons (Paris III)

Le 02/08/2022 à 18:03 par La rédaction

Dans cette poissonnerie parisienne qui porte bien son nom, Arnaud Agostini s’approvisionne en pêche française, durable, et aux arts dormants.

En plein coeur du IIIe arrondissement de Paris, une petite poissonnerie se fait une place dans une rue commerçante. La façade blanche affiche une enseigne moderne et épurée, avec un nom qui ne trompe pas sur la marchandise. La poissonnerie Poissons a été créée en septembre 2019 par Arnaud Agostini, qui a voulu dès le départ parier sur une mise en scène originale et minimaliste pour s’imposer dans le quartier : murs vert d’eau, étal contre le mur, néon industriel… La boutique grande ouverte se repère de loin et donne l’impression de pénétrer dans un autre monde, loin du faste parisien. Cette curiosité est signée de la main de l’agence Mur.Mur Architectes également.

L’étal placé contre le mur a deux utilités : le gain de place, un défi de taille dans la capitale, et le contact client. « J’ai toujours apprécié travailler comme cela, à côté du client », explique Arnaud Agostini. Ici, les clients ont le profil type parisien : plutôt aisé, appréciant les démarches de circuits courts et de durabilité et attaché au sourcing. Ce jour-là un client demande au patron son meilleur poisson blanc, mais aussi celui qui n’est pas menacé par la surexploitation. Comme l’a expliqué Arnaud Agostini, le contact client est très fluide face à l’étal.

Sur ce dernier, nous retrouvons le meilleur de la pêche côtière française : queue de lotte, sole, thon rouge, daurade grise, bar de ligne, rouget-barbet… le tout pêché quasi exclusivement aux arts dormants. Une démarche responsable portée haut par le patron : « J’ai à cœur de n’acheter que de la pêche française, en fonction de la saison. J’utilise le guide de Mr. Goodfish et les bilans de l’Ifremer pour ne pas me tromper. » Nous retrouvons quand même sur l’étal les incontournables cabillaud et saumon, ce dernier étant la seule espèce issue de l’élevage, pour répondre à la demande des clients. « Sans ces produits, on attire moins, on marche moins bien. »

À côté de l’étal frais, qui représente le gros des ventes des quelque 300 clients par semaine, un rayon traiteur propose des préparations comme du poisson pané, du saumon fumé, des rillettes, un curry de gambas, ou encore des rollmops. Sans oublier la paella du samedi, louchée dans un grand réchaud à même le trottoir. Un rayon épicerie, qui se résume à une étagère, propose vins, blinis et chips pour accompagner le poisson : « On ne peut pas se passer de ces produits », conclut le chef d’entreprise.

Une carrière parisienne

Arnaud Agostini a travaillé en poissonnerie sur les marchés d’Arcachon, là où il a grandi, dès ses 18 ans. Puis il se lance dans une carrière d’opticien à Paris après l’obtention d’une licence (Bac + 3) dans ce domaine. Après six ans à vendre des lunettes, il décide de remettre le tablier et part travailler chez un poissonnier meilleur ouvrier de France dans le XVIe arrondissement, où il se fera la main avant d’ouvrir sa propre boutique en septembre 2019.

La crise sanitaire a bouleversé la manière de travailler du patron. Face à la désorganisation du A4 de Rungis en mars 2020, il s’est tourné vers l’achat en direct auprès de mareyeurs bretons et vendéens. Une manière de se rapprocher de la ressource, et d’ainsi pouvoir informer ses clients au mieux : « Notre mission dans les métiers de bouche. » Après la reprise des activités de Rungis, il a continué à s’approvisionner en direct et a également participé à des rencontres avec des pêcheurs. « Le client aime être renseigné sur la filière. La connaître est une vraie plus-value. » Pour lui, une chose est sûre, « les écologistes, ce sont d’abord les pêcheurs ».

Engagé pour la transmission de son métier, il a pris sous son aile Djibril, un apprenti poissonnier. La boutique tourne également grâce à un salarié écailleur, que le patron n’a eu aucun mal à recruter. Dans ses projets futurs, Arnaud Agostini souhaite établir des partenariats avec d’autres poissonneries pour attirer les jeunes vers ce métier, mais également pour mieux maîtriser les achats et le transport.

Arnaud Agostini a acheté son local vide, avec un investissement initial de 110 000 euros, puis a équipé sa boutique au fur et à mesure : table de découpe, machine à glace, équipements de cuisine… Selon lui, il faut être vigilant sur deux éléments pour s’installer : le loyer et l’investissement de départ. Aujourd’hui, le patron se verse un salaire, un bon indicateur de réussite et de santé de l’entreprise.

 

Vincent SCHUMENG

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