La pêche normande toujours plus résiliente

Le 06/03/2024 à 16:01 par La rédaction

Les crises se succèdent mais le secteur halieutique régional tient bon, grâce à des navires de petite taille, une coquille au plus haut et l’importante diversité d’espèces marines.

Première région de France pour la pêche aux coquillages, la Normandie est évidemment la principale productrice de Pecten maximus à l’échelle nationale, avec près de 40 000 tonnes de coquilles Saint-Jacques débarquées dans ses ports lors de la saison 2022-2023. Les années et les records se succèdent et c’est presque logiquement que le début de saison 2023 stagne par rapport à 2022, restant ainsi sur un standard de rendement très élevé. « Les quantités sont importantes et la ressource se porte très bien, se réjouit Dominique Lamort, responsable coquille Saint-Jacques chez Normandie Fraîcheur Mer. À Granville, par exemple, le rendement est excellent. Et si nous étions à un kilo de noix pour neuf kilos de coquilles entières en 2022, là nous sommes à un pour sept. Cela se rapproche du rendement en Manche-Est qui, lui, a reculé », détaille-t-il. Un problème demeure toutefois : la part croissante de coquillages qui passent hors criée, estimée entre 60 et 70 % du total de pêche. Une exception normande (contrairement à la Bretagne, où chaque coquille passe en criée) qui inquiète certains professionnels du secteur (lire dans l’interview de Dimitri Rogoff, PDM no 223 page 38). « Tout ce qui passe en criée est mesuré et à prix fixe, mais ce qui transite en dehors peut être plus ou moins déclaré, confirme Dominique Lamort. Le manque de transparence n’est jamais bon pour le marché mais le produit continue à bien se vendre malgré tout. » Ainsi, en Manche-Est, au 21 novembre, près de 2 100 tonnes avaient été déclarées sous criée depuis l’ouverture de la saison, soit un chiffre globalement  équivalent à celui de l’année dernière. Côté tarifs, les débuts ont été mitigés puis le prix moyen s’est stabilisé à environ 3,50 euros début novembre.

 

Le bulot à la fois haut et bas

Deuxième espèce pêchée dans la région, le gastéropode continue de subir violemment les effets du réchauffement climatique, qui met à mal son cycle reproductif. « L’année 2023 sera équivalente à 2022 en termes de volume, mais les prix sont très élevés », explique Arnauld Manner, directeur de Normandie Fraîcheur Mer. Une quantité faible mais des tarifs très hauts (en fin d’année, le prix moyen est passé sous la barre des 5 euros en criée), un paradoxe bienvenu pour la filière mais qui ne présage rien de bon à long terme. « Les pêcheurs continuent leurs efforts pour accompagner les évolutions de l’espèce, notamment en baissant encore les quotas cette année, mais cela reste inquiétant pour la suite », confirme-t-il. D’autres espèces sont également touchées par cette tendance climatique au réchauffement – bien que dans une moindre mesure – comme le hareng (lire PDM no 223 en page 40) ou le calamar. Toutefois, la crise du bulot vient s’ajouter à de nombreuses autres problématiques auxquelles la pêche normande doit faire face. Brexit, Covid-19, crise économique, inflation, diminution des zones de pêche… Malgré cela, le secteur fait mieux que résister, notamment grâce à des atouts solides. « Les eaux normandes sont “bénies des dieux” car très abondantes, comme pour la coquille, et offrant une grande diversité d’espèces, tempère Arnauld Manner. Nos pêcheurs professionnels arrivent à passer d’une espèce à l’autre et ils ne s’en sortent pas si mal dans leur modèle de pêche côtière artisanale. » Outre sa diversité, le secteur mise aussi sur la qualité. Et sa reconnaissance passe par la labellisation. Sur ce point, des projets sont actuellement en chantier : une IGP Hareng de Fécamp (lire PDM no 223 en page 40), une autre pour l’incontournable coquille de Normandie mais aussi un projet de certification en pêche durable pour la raie bouclée ainsi qu’une certification MSC de pêche durable en Manche-Est pour la coquille. De plus, les certificats « Bulot de la baie de Granville » et « Homard du Cotentin et de Jersey » (lire PDM no 223 en page 41) ont été renouvelés en cette fin d’année. « Ce sont des marches de longue haleine mais des projets structurants pour la filière, et on espère pouvoir les mener à bien », se réjouit Arnauld Manner. L’huître
de Normandie, elle, a décroché l’IGP fin octobre.

 

Guy PICHARD

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