Les entreprises de plus de 20 salariés avaient jusqu’au 1er mars pour transmettre leur déclaration annuelle obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés (DOETH) à l’Agefiph (1). Une démarche complexe qui sera simplifiée à compter du 1er janvier 2020. Elle se fera désormais par le biais de la déclaration sociale nominative (DSN). Et ce n’est pas la seule règle modifiée par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, promulguée le 5 septembre 2018. Une série de mesures vise à augmenter le taux d’emploi des personnes en situation de handicap. De fait, plus de trente ans après la loi de 1987 qui a instauré une obligation d’emploi de 6 % de travailleurs handicapés, ceux-ci n’occupent que 3,4 % des emplois du secteur privé et représentent 5,2 % des agents publics. Un tiers des entreprises comptent moins de 2 % de travailleurs handicapés dans leurs effectifs.
En novembre, lors de la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, Muriel Pénicaud, ministre du Travail, a appelé à une mobilisation générale « afin de tendre vers une société plus inclusive pour les travailleurs handicapés et de lever tous les verrous lors de leur parcours professionnel : apprentissage, formation, accès et accompagnement à l’emploi ». En soulignant : « En 2018, nous avons mis en place les outils. En 2019, chacun doit s’en saisir. »
De fait, si l’obligation d’emploi continue à ne concerner que les entreprises de plus de 20 salariés, toutes, quelle que soit leur taille, devront désormais déclarer l’effectif de travailleurs handicapés qu’elles emploient. Chacun d’eux, quel que soit son contrat de travail – CDI, CDD, intérimaire, stage, période de mise en situation en milieu professionnel – sera comptabilisé au prorata de son temps de travail. Autre changement : si une entreprise possède plusieurs établissements, l’obligation d’emploi ne s’applique plus à chaque établissement individuellement, mais à l’effectif total de l’entreprise. Jusqu’ici, une entreprise constituée de 20 établissements comptant chacun cinq salariés n’était pas concernée ; l’effectif pris en compte étant désormais de 100 personnes, elle sera soumise à l’obligation d’emploi. L’employeur pourra certes toujours s’en acquitter en s’engageant dans un accord agréé d’entreprise, de groupe ou de branche, mais l’accord sera limité à trois ans, renouvelable une fois. Enfin, le recours à l’emploi indirect, par des contrats de sous-traitance avec des entreprises adaptées (EA), des établissements et service d’aide par le travail (Esat) et/ou des travailleurs handicapés indépendants, ne sera plus comptabilisé dans le taux d’emploi. Ils donneront toujours droit, en revanche, à des déductions sur la contribution financière due à l’Agefiph par les entreprises qui n’atteignent pas le taux d’emploi de 6 %. Clairement, la nouvelle loi a pour objectif d’augmenter l’emploi direct de personnes handicapées, en favorisant leur recrutement.
En chiffres ▩ 2,7 millions de personnes en situation de handicap et en âge de travailler. |
Pour autant, l’intégration dans les équipes de travailleurs des Esat peut être une vraie réussite. L’exemple d’Aléor, qui cultive, récolte et transforme des algues à Lézardrieux (Côtes-d’Armor) le prouve. Depuis plusieurs années, l’entreprise travaille avec des salariés de l’Esat de Tréguier, situé à une vingtaine de kilomètres. « L’expérience est née d’un échange avec l’un de nos clients et de la volonté de notre président de donner une dimension sociale et solidaire à l’entreprise », explique son directeur Christophe Caudan. Ces travailleurs handicapés représentent près de deux équivalents temps plein, qui s’ajoutent à son effectif de cinq personnes. « Ils sont devenus des collègues à part entière », reprend le dirigeant. Et la motivation est au rendez-vous. Tri des algues, nettoyage, lavage, séchage, conditionnement en vrac ou en sachet, ils participent quasiment toute l’année à de nombreuses activités de l’entreprise, par équipes de trois-quatre à six-huit personnes selon les besoins. « Ils nous apportent une grande souplesse. Pour certaines tâches, le temps de formation a pu être un peu plus long, convient-il. C’est aussi le cas lors de la mise en place de process spécifiques. En revanche, ils sont déjà sensibilisés aux bonnes pratiques d’hygiène et aux règles de sécurité. » Et si les moniteurs de l’Esat étaient présents au début, ces travailleurs sont rapidement devenus autonomes, d’autant que plusieurs d’entre eux ont leur permis de conduire.
Anne-Caroline RENARD
(1) Association de gestion du fonds
pour l’insertion des personnes handicapées