Par la voix de Joël Labbé, sénateur écologiste du Morbihan, l’association Ostréiculteur traditionnel porte le débat sur l’étiquetage obligatoire du mode de production des huîtres devant les parlementaires. « Rien ne distingue une huître née en mer des huîtres triploïdes nées en écloserie. Nous devons trouver collectivement une solution législative ou réglementaire », a souligné le sénateur lors d’une conférence de presse qui s’est tenue fin janvier au Sénat.
Depuis des années, l’association ostréicole milite pour une meilleure transparence. Expliquée à la presse nationale et aux politiques, la revendication prend d’autant plus d’ampleur qu’elle touche des consommateurs soucieux du contenu de leur assiette.
Entouré de plusieurs membres de l’association, Joël Labbé a annoncé un colloque de filière sur ce thème début juin au Sénat. Également présente à la conférence, Marie-Hélène des Esgaulx, sénatrice UMP de Gironde et maire de Gujan-Mestras, soutient la demande d’étiquetage : « Le rôle des parlementaires est important pour faire avancer le dossier sur le plan réglementaire. »
Entre 30 et 50 % des huîtres proviennent d’écloseries selon les années. À la différence de celles captées en mer, ces huîtres dites triploïdes sont normalement stériles. Comme elles ne fabriquent pas de laitance, elles grossissent plus vite et leur commercialisation s’étale sur toute l’année. Mais Benoît Le Joubioux, président de l’association Ostréiculteur traditionnel, s’oppose à une forme d’industrialisation de la profession : « La dépendance des ostréiculteurs par rapport aux écloseries s’apparente à celle des agriculteurs vis-à-vis des semenciers. Depuis 2008, toute la profession subit des mortalités liées au variant de l’herpès virus de l’huître. Nous n’incriminons pas les triploïdes car les traditionnels sont aussi touchés. Le problème des triploïdes tient dans l’appauvrissement génétique, parce que la sélection porte sur un nombre restreint de géniteurs. »
D’où le questionnement sur les conséquences d’un affaiblissement du patrimoine génétique qui pourrait jouer sur la résistance des huîtres aux bactéries et aux virus. Guidée par le principe de précaution, l’association demande une sanctuarisation des bassins de captage naturel, en particulier à Arcachon.
Aux préoccupations écologiques s’ajoutent les préoccupations économiques, car une huître née en mer coûte plus cher à produire. Quand le cycle d’une huître triploïde varie de 18 à 30 mois, celui d’une huître née en mer prend trois à quatre ans. Soit environ un de plus, ce qui signifie davantage de besoins en fond de roulement, en surface concédée et en main-d’œuvre. « Si on raisonne en seuils de production par unité de travail, il faut produire au moins 30 à 35 tonnes en mode traditionnel. Avec le cycle plus court de la triploïde, 20 à 25 tonnes suffisent par unité de travail. L’étiquetage permettrait aux ostréiculteurs traditionnels de se différencier, de valoriser leur produit », défend Jean-Noël Yvon, ostréiculteur dans la ria d’Étel.
En collaboration avec Ostréiculteur traditionnel, le Réseau cohérence qui accompagne des agriculteurs et des ostréiculteurs bretons dans une démarche de production durable, étudie la pertinence d’un signe officiel de qualité.
Bruno VAUDOUR
Pour en savoir +
www.ostreiculteurtraditionnel.fr