À la tête de plusieurs sociétés de pêche, de transformation et d’aquaculture d’envergure internationale il y a quelques années, Michel Adrien, 81 ans et président de la SAS groupe Adrien, cherche aujourd’hui à sauver ce qui reste d’activités et d’emplois au sein de la holding familiale. Placés en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Nantes le 29 octobre, le groupe Adrien et sa filiale France Turbot se heurtent à une dette de 7 millions d’euros. Plus d’une centaine d’emplois dépendent d’une activité résiduelle de négoce de produits de la mer et surtout de France turbot, le dernier pôle de production du groupe.
La filiale comprend plusieurs entités : écloseries et nurseries d’huître à Noirmoutier et à Thau au travers de la filiale BTM, écloserie et grossissement de turbot à Noirmoutier et grossissement seul de turbot à Trédarzec dans les Côtes d’Armor. L’ensemble est opérationnel, ce qui conforte l’idée qu’il y aura des repreneurs. Sur l’exercice 2013-2014, France turbot a produit 700 millions de naissains d’huîtres, environ 960 000 turbotins et 215 tonnes de turbot. « Nous étudions à présent toutes les possibilités de reprises en tablant sur une séparation des activités huîtres et turbot » précise Michel Adrien.
Une centaine d'emplois concernés
A priori, l’activité ostréicole paraît plus facile à céder car moins gourmande en capital. Plusieurs gros clients ostréiculteurs y trouveraient un intérêt pour sécuriser leurs approvisionnements. Des propositions peuvent venir également des quelques concurrents écloseurs, tentés de prendre une première place. Avec un bémol, la reprise du captage naturel après plusieures années de déficit pourrait peser sur le prix du naissain.
Côté turbot, une relance de l’activité nécessite des améliorations techniques pour revenir à 250 tonnes de production. Le besoin d’investissement concerne principalement les économies d’énergie, les systèmes de filtration et de régulation de température. Dans tous les cas, il semble difficile de séparer la ferme de Trédarzec du pôle écloserie et grossissement à Noirmoutier.
Sur le terrain commercial, le turbot élevé en France dispose d’un bon capital confiance en restauration haut de gamme et à l’export grâce au label Rouge. France Turbot vend 75 % de ses poissons sous le label officiel et exploite des niches rémunératrices comme le turbot vivant ou les découpes en pavés pour les grandes brasseries. Depuis 2011, l’entreprise a développé avec succès l’Alliance du goût une sélection de produits de la mer de qualité afin d’élargir la clientèle turbot.
Plusieurs options de reprises
Parmi les hypothèses de reprise de l’activité poisson, il s’agirait plutôt d’opérateurs français. Soit les cadres eux-mêmes ou un acteur aquacole de dimension nationale. De fait, les sites d’aquaculture marine sont trop rares en France pour laisser filer l’opportunité. L’exemple d’Aquanord près de Dunkerque l’a montré ; malgré ses turpitudes, la plus grande ferme française de bar et daurades a trouvé des investisseurs pour continuer.
L’avenir de France Turbot dépend étroitement des conditions de reprise, globale ou partielle, et d’apurement de la dette. Dans l’immédiat, l’entreprise fonctionne et personne n’imagine que l’outil tombe à l’abandon.
B. VAUDOUR
Retour sur une trajectoire en zigzag
Précurseur en investissant l’élevage de turbot, l’armateur Adrien a développé la pêche et la transformation au Pérou mais le manque de fonds propres et des épisodes difficiles fragilisent aujourd'hui le groupe familial.