Dans l’ancien bâtiment de la Houle Marée, sur le port de Saint-Guénolé, le mareyeur Océalliance a investi en 2023 dans un nouvel atelier de transformation, Furic Saint-Guénolé, avec en ligne de mire principale le rayon marée libre-service.
Port d’attache d’une majorité des bolincheurs finistériens, Saint-Guénolé est balayé ce matin du mercredi 21 février par les rafales de la tempête Louis. Les sardiniers sont encore cloués à quai et, pour une bonne partie d’entre eux, l’arrêt dure depuis le 22 janvier. Les senneurs sont aussi touchés par la fermeture du golfe de Gascogne.
Guénolé Merveilleux, président d’Océalliance et de l’Abapp (Association bretonne des acheteurs de produits de la pêche), annonce ce jour 3 000 tonnes de poissons en moins, rien que pour les criées du sud de la Bretagne. Le communiqué de l’UMF (Union du mareyage français) détaille l’impact du mois de fermeture du golfe : Le Guilvinec, certes l’une des criées les moins touchées, subit une perte de 35 % par rapport à 2023, plutôt liée à la casse de chalutiers hauturiers du PAI (plan d’accompagnement individuel). La criée de Lorient accuse un recul de 55 %, celle des Sables-d’Olonne de 56 %, La Rochelle de 61 % et Royan plonge à – 91 %. Il est probable que Foro Marée ait été le mareyeur du groupe le plus affecté, en manque cruel de sole notamment.
Ce rude début 2024 n’est-il que le prélude d’une annus horribilis, après une année 2023 particulièrement plombée ici ? La Cornouaille a été foudroyée par la casse de plus de 40 unités hauturières au PAI. Il faut donc être bien motivé pour s’engager dans les métiers de cette filière des produits de la mer dans la tourmente. C’est le cas du trio de jeunes cadres, emblématique de la nouvelle génération, à l’œuvre chez Océalliance et qui nous guide dans les arcanes de Furic Saint-Guénolé, dès l’aube.
Frédéric Robin, 37 ans, est arrivé dans le groupe en 2019 en tant que responsable export, puis promu responsable commercial en 2021. De formation supérieure dans le commerce agroalimentaire, il était auparavant responsable export à la Compagnie des Pêches de Saint-Malo, pendant sept ans. Émilie Moisan, 33 ans, a rejoint Océalliance en 2022 après six ans au sein du groupe quimpérois des Biscuiteries Réunies, qui comprend la conserverie Courtin. Elle est chargée de la communication, du marketing, et du numérique. Cécile Mathieu, 26 ans, est l’ingénieure en recherche et développement « volante » du groupe depuis 2021, formée à l’Institut Agro de Rennes avec une spécialisation PVH (production et valorisation des produits halieutiques). Elle avait effectué un stage à Furic Marée, puis Furic Solutions.
Accélérer le développement des activités de transformation
Après avoir repris l’activité de Saint-Gué Froid en 2017 et créé Furic Solutions, Océalliance a investi plus d’un million et demi d’euros dans la rénovation de ces 2 800 mètres carrés d’ateliers, en face de la criée de Saint-Guénolé. Le groupe y a transféré son activité de transformation, démarrée dans les années 2000 au Guilvinec dans un atelier exigu. La cuisson de crustacés et coquillages, leur conditionnement en barquettes et la surgélation IQF ont vraiment pris de l’ampleur sur ce nouveau site bigouden. La tendance aux produits destinés au rayon marée libre-service, dont ceux prêts à consommer, avait bien été repérée par le groupe, déjà très présent sur l’étal traditionnel des enseignes de la grande distribution française, et même étrangère : sur les 230 millions d’euros de CA d’Océalliance (2022), 80 sont assurés par l’export, soit 35 %. Une proportion bien supérieure à la moyenne du mareyage français.
Afin de poursuivre cette stratégie de valorisation de la pêche française, Océalliance a créé Furic Saint-Guénolé en 2021, un établissement de Furic Solutions, mais dans un bâtiment voisin, auparavant occupé par la Houle Marée. Le groupe a de nouveau investi 1 million d’euros en 2023 pour rénover et équiper 1 000 mètres carrés d’ateliers et ainsi créer des gammes de produits adaptées aux nouveaux modes de consommation en s’appuyant aussi sur le saumon, qui reste un incontournable du rayon marée. En mai 2022, Océalliance est passé dans le giron de Prosol/Grand Frais (du fond Ardian). Le groupe ne souhaite répondre à aucune question concernant les implications de ce rachat.
Maintenir les emplois d’Océalliance en Cornouaille dans un contexte difficile
La nouvelle gamme de barquettes de produits sauvages nature, portionnés, assaisonnés, avec un léger ajout de topping légumes, de même que celle des produits marinés, aussi prêts à cuire, ne sont pleinement sur le marché que depuis la fin de l’été dernier, une fois l’atelier opérationnel. Dans cette première catégorie dite de « valorisation de la pêche française » figuraient déjà les produits bruts, nature (filets de merlu, merlan, églefin, sardine, cardine…). Mais cette gamme a été élargie, avec des barquettes de darnes de lotte et de congre, quasi inédit en LS. La deuxième catégorie, dite de « traiteur de la mer », plus élaborée, est plus récente : des déclinaisons de gravlax, carpaccio et tartare pour l’instant à partir de saumon, truite et bar d’élevage ainsi qu’un ceviche de daurade sont disponibles depuis cet hiver, toujours au rayon LS. Ils intéressent aussi la restauration et même des poissonniers. Ainsi, Océalliance table sur un prévisionnel 2024-2025 de 5 millions d’euros et la création de 20 emplois dans les trois ans, en plus des 10 actuels, à Furic Saint-Guénolé : petit atelier deviendra grand ?
Lionel FLAGEUL