Retour à la croissance à deux chiffres pour GlobeXplore

Le 05/07/2022 à 17:29 par La rédaction

Lauréate des Seafood Excellence Global Awards 2022, au salon de Barcelone, la PME finistérienne, pionnière de la transformation des algues alimentaires, assure son sourcing avec la récolte d’algues de rive, complétée par l’algoculture, en progrès.

La météo est idéale ce 19 avril et facilite le travail, qui reste assez physique. Sous un soleil printanier, en moins de deux heures, David Le Chelard va cueillir près de 800 kg d’Himanthalia elongata, le haricot de mer, chargés à bord de son canot, le Mouez Ar Mor, « la voix de la mer » en breton. La zone de récolte de cette période de grande marée est à proximité immédiate de Porscave, le petit port en eau profonde de Lampaul-Plouarzel, au nord-ouest de Brest. Cette côte du nord de la Bretagne dispose du plus beau champ d’algues d’Europe, dont l’exploitation est très encadrée.

Lorsqu’une équipe de TF1 a filmé David en février dernier pour un reportage diffusé au moment du One Ocean Summit de Brest, la récolte de Saccharina latissima, le kombu royal, s’était faite sous la pluie et les bourrasques de nordet, glacial. De rudes conditions hivernales que le goémonier de 50 ans peut aussi endurer en octobre ou novembre, en fin de saison de la Palmaria palmata, la dulse. D’abord marin pêcheur en baie de Saint-Brieuc, ce Costarmoricain d’origine est un homme de mer pluriactif. Il se partage entre un mi-temps embarqué comme bosco sur les navires océanographiques de l’Ifremer (90 jours de mer) et, le reste du temps, son activité de goémonier, salarié depuis 2018 par GlobeXplore, qui a racheté son bateau.

L’entreprise de Rosporden, très satisfaite de la qualité des algues vendues depuis 2010 par David, a sécurisé cet apport en le salariant. Le gars de Plouarzel assure actuellement la fourniture d’un peu moins de la moitié des 50 à 60 tonnes d’algues fraîches transformées par GlobeXplore par an. Elle achète des algues de rive à cinq autres goémoniers du Léon, dont Jean-François Kermoal, qui ramasse aussi 300 tonnes par an d’Ascophyllum nodosum et de Fucus vesiculosus dans le Finistère. Mais ces deux algues, destinées à la décoration, ne sont pas transformées, elles sont juste commercialisées par GlobeXplore aux GMS et restaurateurs, au départ du Guilvinec. Ce négoce est l’activité initiale de Globe Export, le premier nom de l’entreprise créée dès 1986 par Christine Le Tennier, inlassable avocate des algues pour la consommation humaine, « l’aliment parfait du futur », selon elle. À une époque où ce marché des algues était inexistant, cette brito-canadienne, ex-cadre de la chaîne Hilton, est persuadée de leur potentiel économique formidable. Mais tout était à faire pour convaincre les Français de manger des algues sous toutes les formes…

Il a fallu construire une gamme de familles de produits de plus en plus étoffée, pendant plus de 20 ans, avant d’atteindre le premier million d’euros de chiffre d’affaires en 2009, année capitale avec la mise sur le marché des fameuses « perles de saveur », ces petites sphères d’alginates au cœur liquide qui libèrent en bouche leurs saveurs salées ou sucrées une fois croquées. Un produit de la cuisine moléculaire, dont le process industriel est mis au point par un jeune stagiaire ingénieur en agroalimentaire, Mathieu Isoard, devenu le responsable R&D, puis le dirigeant et actionnaire principal de l’entreprise de 2014 à 2018. Le succès commercial des perles, immédiat, est fulgurant. C’est l’accélérateur de croissance phénoménal de GlobeXplore, assurant la moitié des ventes actuelles. Aussi, le chiffre d’affaires dépasse les 5 millions d’euros en 2019 : c’est le leader français sur ce marché des algues alimentaires, si l’on compte les perles. Un montant retrouvé dès 2021, après un recul à 4 millions en 2020, dû à la crise sanitaire (restauration et exports impactés). Des travaux d’aménagement pour accroître la production sont en cours et 2022 est bien partie pour offrir une nouvelle croissance à deux chiffres, toujours basée sur les deux piliers de l’entreprise : les perles et les algues fraîches transformées à proprement parler. La consommation de ces dernières a été portée par l’attrait de la cuisine asiatique et par la recherche d’aliments biologiques locaux et de sources de protéines non animales. Ses consommateurs avertis réguliers sont des flexitariens et des végans. La clientèle des perles, exportées dans 35 pays, est plus large. On reste toutefois très loin d’une consommation de masse démocratisée en Europe, alors que l’Asie engloutit l’essentiel de ses 35 millions de tonnes annuelles, essentiellement produites par l’algoculture.

En 2022, Antoine Ravenel, ingénieur agroalimentaire et directeur de GlobeXplore depuis 2019, vante une fois de plus l’intérêt nutritionnel de ses algues. Le trio dulse-haricot-ulve, aux saveurs complémentaires, forme la base de plusieurs de ses tartinables, vendus en bocaux stérilisés ou en doypacks pour la restauration. Ils constituent la principale famille de produits de sa gamme de plus de 150 références. Conscient des limites du sourcing en algues de rive, le jeune dirigeant croit beaucoup à la culture des algues en Europe pour répondre à la croissance du marché, notamment pour les espèces les plus en tension comme l’ulve et la dulse, pour peu que son coût de revient baisse vraiment.

 

Reportage de Lionel FLAGEUL

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