Initialement plus portés sur la viande que sur les produits de la mer, les clients du Super U de Plogonnec, en pleine zone rurale, point de passage obligé entre le pays Glazik (Quimper) et le Porzay (Châteaulin), peuvent compter sur un rayon marée conséquent.
Lorsque leur supermarché a ouvert en 2007, à l’entrée de Plogonnec (Finistère sud), Gilbert et Annie Philippe, le couple d’associés-gérants, ont enrichi l’offre en ouvrant notamment un rayon poissonnerie. Il n’existait pas dans leur ancien Super U enclavé dans le bourg, de 1 200 mètres carrés seulement, contre 2 000 pour leur nouveau commerce flambant neuf. Dans cette commune rurale d’un peu plus de 3 000 habitants, à mi-chemin entre Quimper et Douarnenez, la réussite d’un rayon marée n’était pas assurée : le rayon phare ici, c’est la boucherie, avec un staff de huit bouchers qui débitent des carcasses entières de bovins. Aux beaux jours, pas moins d’un millier de brochettes de viande sont élaborées et vendues par semaine.
Mais Erwan Philippe, le fils, a suivi la formation à Innomer Lorient et a toujours été convaincu de la nécessité d’avoir un beau rayon marée pour conforter l’attractivité du magasin. Avec sa sœur Nathalie, il prend la succession de leurs parents à la tête de l’entreprise en 2016, après une vingtaine d’années à leurs côtés. La famille Philippe est commerçante depuis trois générations : le grand-père, maire, tenait une épicerie-bar.
Les deux associés sont omniprésents au quotidien, ils dirigent leur supermarché sans directeur, en relation étroite avec leurs 12 managers de rayon, dont Bernard Pavec, le responsable de la poissonnerie, recruté par Erwan. Si la boucherie prospère toujours autant, avec une clientèle de carnivores imperturbables, la poissonnerie s’est aussi très bien développée. Les deux rayons partagent depuis quelques mois une emballeuse-peseuse Guelt qui permet d’alimenter en barquettes sous atmosphère leurs modules en libre-service.
Les produits frais assurent 52 % du chiffre d’affaires total du magasin, en croissance continue : il se classe à la troisième place du Finistère, sur 28 commerces de la coopérative U. Pas moins de 200 fournisseurs locaux (15 % du CA) alimentent la grande surface, qui a toujours eu cette politique volontariste. La poissonnerie a été entièrement refaite lors du dernier agrandissement, comme tous les rayons des métiers de bouche. Elle a franchi un cap important en 2021, avec l’achat direct à la criée des côtiers, au Guilvinec, surtout, et à celle de Concarneau, en été, les deux grands ports étant situés à 40 kilomètres. Avec un effectif porté à quatre poissonniers, c’était devenu jouable, le gain qualitatif et économique évident. Ainsi, ce rayon marée contribue à hauteur de 3,80 % au CA global du magasin, alors que 3,30 % sont considérés comme bons chez Système U.
Une carrière dans la grande distribution
Il a assurément l’esprit « PEPS », à savoir : passionné, engagé, professionnel et sympa, en langage Système U. Ce sont les qualités recherchées pour les 73 000 collaborateurs de l’enseigne aux 1 601 magasins. Mais cette semaine, il faudrait rajouter un F, comme fatigué, tant Bernard Pavec a dû dépasser ses 42 heures hebdomadaires pour compenser des absences dans son équipe. Signe des temps, le magasin a organisé son premier job dating en juin : les poissonniers, bouchers et boulangers sont rares… Aussi, l’enseigne U a mis en place l’École de la nouvelle alimentation, en partenariat avec quatre centres, pour des formations rémunérées et en alternance d’un an (CAP et CQP, certificat de qualification professionnelle). Bernard Pavec, 51 ans, est doté d’un BEP Dicopa (distribution et commercialisation des produits agroalimentaires) option produits de la mer, obtenu au lycée Kerustum à Quimper. En stage au centre Leclerc de la ville, il y est embauché une fois le diplôme obtenu et débute une carrière dans la grande distribution. Après Quimper, il va travailler 19 ans au Leclerc de Châteaulin, y devenant chef du rayon à l’âge de 24 ans. Puis il passe par l’Intermarché de Pleyben. Erwan Philippe, qui le connaît depuis Kerustum, le convainc alors de le rejoindre au Super U de Plogonnec, en pleine croissance. Bernard apprécie son autonomie : il peut choisir ses fournisseurs, en direct, comme Acomar à Concarneau, ou les Pêcheries Douarnenistes. S’ils impliquent un timing au cordeau, les achats à la criée côtière du Guilvinec lui permettent d’optimiser la qualité et la diversité de son étal. Par fortes chaleurs, les achats de langoustine à la criée de Concarneau, le matin, sont préférées. Le triptyque saumon-crevette-cabillaud et les produits transformés en LS, référencés en national (Briau, Delpierre, Rolmer, La Cancalaise…), proviennent de la base U Log de produits frais de Plaintel (22).
Le prochain challenge de Bernard est de développer une gamme de produits traiteur maison. L’arrivée récente d’Audran Lajin, 20 ans (cf. photo), formé au CFA de Rungis, va y contribuer. Le jeune homme, du 9-3, voit son rêve d’enfant se réaliser : il a passé ses étés en vacances à Douarnenez, il y habite désormais.
Lionel FLAGEUL